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Russie. Il faut cesser de persécuter les défenseurs des droits humains en Tchétchénie

Les autorités russes doivent prendre des mesures afin de mettre un terme à la campagne d’intimidation et de harcèlement menée à l’encontre des défenseurs des droits humains en Tchétchénie, ont déclaré Amnesty International et Human Rights Watch lundi 15 décembre 2014, après l’incendie du bureau d’une organisation locale de défense des droits humains.

Elles doivent également protéger efficacement tous les militants menacés parce qu’ils font leur travail.

Dans la soirée du 13 décembre, le Groupe mobile conjoint (JMG), une organisation de défense des droits humains qui travaille avec des ONG d’autres régions de Russie, a été détruite par un incendie dans la capitale tchétchène, Grozny. Il s’agirait d’un incendie volontaire.

« Ces actes d’intimidation s’inscrivent dans le cadre d’une répression de la liberté d’expression dans la région. Le leader tchétchène Ramzan Kadirov semble mener une campagne personnelle contre le JMG et son dirigeant Igor Kaliapine », a déclaré Anna Neistat, directrice des recherches à Amnesty International.

Le 13 décembre, lors d’une manifestation contre les groupes armés opérant dans la région, on pouvait lire sur des banderoles que l’ONG soutenait le terrorisme. Le même jour, des membres du JMG ont été suivis par des hommes armés et masqués, circulant à bord d’une voiture qui appartiendrait à des responsables tchétchènes de l’application des lois.

Le 14 décembre, la police est entrée dans l’appartement loué par le JMG à Grozny. Sans fournir aucune explication ni présenter de mandat de perquisition aux deux employés présents, les policiers ont saccagé l’appartement, confisqué des téléphones portables, des appareils photos, des ordinateurs portables et des équipements électroniques. Ils ont aussi procédé à des palpations sur les deux employés du JMG et fouillé leur véhicule. Ces deux hommes, Sergueï Babinets et Dimitri Dimitriev, ont été retenus par la police pendant plusieurs heures avant d’être libérés sans inculpation.

Amnesty International et Human Rights Watch ont demandé aux autorités russes d’enquêter sur l’incendie, de garantir la protection des employés du JMG et d’honorer leur engagement consistant à promouvoir un climat de travail normal pour les défenseurs des droits humains.

« Ce n’est pas la première fois que les autorités tchétchènes lancent une campagne de harcèlement contre ceux qui défendent les droits fondamentaux en Tchétchénie, a déclaré Hugh Williamson, directeur de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. La violence de ces derniers agissements contre des militants laisse à penser qu’elles ont franchi un cap. »

Amnesty International et Human Rights Watch demandent aux autorités russes de mener dans les meilleurs délais une enquête approfondie sur les attaques et les menaces et de traduire en justice les responsables présumés.

Complément d’information

Le 4 décembre, 11 membres d’un groupe armé ont lancé une attaque contre des responsables de l’application des lois dans le centre de Grozny. Lors de cet affrontement, ils ont tous été tués, ainsi que 14 membres des forces de sécurité et au moins un civil. Le lendemain, le président de la République tchétchène Ramzan Kadirov a déclaré que les familles des membres du groupe armé seraient expulsées de Tchétchénie et que leurs maisons seraient détruites. En quelques jours, au moins neuf maisons dans cinq villes différentes ont été incendiées par des inconnus et réduites en cendres. Aucune enquête n’a été ouverte pour faire la lumière sur ces événements.

Le 9 décembre, Igor Kaliapine, directeur du JMG, a demandé aux autorités russes d’enquêter afin de déterminer si l’appel de Ramzan Kadirov à expulser les familles des insurgés et à détruire leurs maisons constitue une infraction pénale au titre de l’article 286 du Code pénal russe pour « abus d’autorité ». Le lendemain, via son compte de réseau social, Ramzan Kadirov a affirmé qu’« un certain Kaliapine » aidait les rebelles en Tchétchénie, notamment en leur fournissant de l’argent.

Le 11 décembre, plusieurs défenseurs des droits humains bien connus ont tenu une conférence de presse conjointe à Moscou pour dénoncer la pratique illégale des sanctions collectives en Tchétchénie. Igor Kaliapine, qui en faisait partie, a été agressé durantla conférence de presse par plusieurs hommes, qui lui ont crié des insultes et lancé des œufs. Pendant plusieurs jours, Igor Kaliapine a ensuite reçu des appels téléphoniques et des textos de menace.