Manifestations pour la justice raciale suite à la mort de George Floyd lors d'un violent affrontement avec la police dans le Minnesota. Centre de Washington, DC, États-Unis, 3 juin 2020. © Amnesty International (Photo: Alli Jarrar)

Quatre ONG pour un traité sur le commerce des armes

Ce matin, 72 heures avant le début des négociations historiques en vue d’un Traité sur le commerce international des armes (TCA), quatre ONG luxembourgeoises (Amnesty International, la Caritas, la Croix-Rouge luxembourgeoise et Handicap International) ont organisé une conférence de presse commune pour faire part de leurs attentes concernant le Traité sur le commerce des armes et exprimer leur espoir que ce traité fasse réellement une différence sur le terrain. Les quatre ONG saluent les efforts du gouvernement luxembourgeois en la matière et l’appellent à mettre tout en œuvre pour éviter que le texte du traité ne soit affaibli. Cet appel s’inscrit également dans la perspective de la cohérence des politiques pour le développement, un principe inscrit dans la loi luxembourgeoise et les traités européens. Les dernières informations reçues par les ONG indiquent qu’une position commune forte de la communauté internationale sur le projet de traité semble possible. Initié en 1997 par plusieurs lauréats du Prix Nobel de la Paix, le Traité sur le commerce des armes sera peut-être adopté d’ici au 27 juillet.

Chaque année, plus de 500.000 personnes meurent dans le monde suite à l’utilisation d’une arme, soit plus d’une personne chaque minute. Chaque année, les producteurs d’armes vendent l’équivalent de deux munitions par habitant de la planète ainsi que 8 millions d’armes à feu, alors que 875 millions de ces mêmes armes sont déjà en circulation. Le commerce sauvage des armes alimente la violence armée généralisée, les crises humanitaires et l’interruption de tout processus de développement. Selon un rapport produit en 2007 par trois ONG (Oxfam International, le Réseau d’action internationale sur les armes légères et Saferworld), le coût des conflits armés en Afrique depuis 1990 équivalait à l’ensemble de l’aide internationale durant la même période (soit 284 milliard de dollars US). En moyenne, un conflit armé réduit de 15% l’économie d’un pays africain et coûte 18 milliards par an aux économies africaines. Les conflits au Burundi et au Rwanda ont réduit le produit national brut de ces pays de respectivement 37% et 32%.

Selon des informations d’Amnesty International, les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies (Etats-Unis, Russie, Royaume-Uni, Chine, France) et l’Allemagne totalisent à eux seuls 74% des exportations d’armes dans le monde. En outre, la Chine et la Russie sont responsables d’exportations d’armes à destination de deux gouvernements qui violent de manière flagrante les droits humains et le droit international humanitaire (Syrie et Soudan). Un autre rapport récent de l’organisation indique que l’Afrique du Sud, la Chine, l’Egypte, les Etats-Unis, la France et l’Ukraine continuent à exporter des armes vers la République démocratique du Congo (RDC), et ce en dépit de violations graves des droits humains et du droit humanitaire commises tant par les forces de sécurité congolaises que par les groupes armés. Enfin, des partenaires proches du Luxembourg (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, États-Unis, France, Italie, République tchèque, Royaume-Uni et Russie), figurent parmi les principaux fournisseurs d’armes aux régimes ayant réprimé le « printemps arabe ».

Un traité fort en matière de droits humains et de droit international humanitaire pourrait sauver des milliers de vies et prévenir un appauvrissement de pays déjà fragiles. Afin qu’il protège efficacement les droits et les vies des personnes, les ONG demandent donc qu’une règle d’or soit au cœur de tout accord. Cette règle exigerait que l’ensemble des États mènent des évaluations au cas par cas du risque posé par tout transfert d’armes international envisagé, afin de le bloquer s’il existe un risque important que ces armes soient utilisées pour commettre des violations du droit international humanitaire ou des droits humains. Les quatre ONG encouragent en outre les parlementaires et le gouvernement luxembourgeois à entamer un travail de fond concernant une régulation des investissements financiers dans l’industrie de l’armement.