Pour une protection accrue des victimes de la traite des êtres humains

Chaque année, plusieurs millions de personnes, dont une majorité de femmes et d’enfants, sont considérées comme des marchandises à acheter et à vendre, que l’on force à travailler, la plupart du temps dans l’industrie du sexe, mais également dans d’autres secteurs, au sein d’ateliers, clandestins ou non ou comme esclaves domestiques. A l’occasion de la troisième Journée Européenne de Lutte contre la traite des êtres humains, le 18 octobre 2009, Amnesty International Luxembourg, Caritas Luxembourg et ECPAT Luxembourg demandent au gouvernement luxembourgeois de continuer ses efforts dans sa lutte contre la traite. Ana, jeune roumaine d’une vingtaine d’années, a connu un foyer d’état jusqu’à ses 14 ans, la violence d’un père et d’un frère alcooliques et la violence d’un mari. A 20 ans, n’en pouvant plus, elle décide de fuir. Elle rencontre alors un homme qui lui propose un contrat de travail de 3 mois comme femme de charge dans un restaurant en Grèce, ainsi que l’ouverture d’un compte bancaire à son nom en Roumanie, afin qu’elle puisse envoyer de l’argent pour l’éducation de sa fille. Ayant sollicité un délai de réflexion, l’homme, pressé, insiste pour qu’elle lui confie néanmoins ses papiers d’identité, afin qu’il dépose une demande de passeport à son nom. Une semaine plus tard, prétextant qu’elle devait signer son nouveau passeport au poste de Police, l’homme vient la chercher. Mais au lieu de connaître les locaux de la Police, Ana découvre la Serbie, où elle est prostituée de force. Vendue à 10 clubs différents, ce n’est que grâce à l’aide d’un client que 2 ans plus tard, elle réussit à s’échapper. Ana n’est pas la seule dans son cas. Le commerce de femmes, d’enfants et d’hommes est en train d’exploser au niveau mondial. A la recherche d’un travail ou d’une vie meilleure, beaucoup tombent dans les mains des trafiquants d’êtres humains sans scrupules qui leur font miroiter un travail, une formation ou un mariage à l’étranger. Dans la plupart des cas ce sont des membres de la famille ou des connaissances qui les vendent. Il est difficile d’obtenir des estimations fiables concernant le nombre de victimes de ce commerce. Selon l’Organisation International du Travail 2,45 millions de personnes seraient victimes de la traite des êtres humains dont 43% à des fins d’exploitation sexuelle et 32% à des fins d’exploitation par le travail. Les enfants représenteraient 40% à 50% des victimes. Ce commerce ignoble est alimenté par une demande croissante de forces de travail bon marché dans l’industrie du sexe, de la construction, dans les travaux agricoles et dans la domesticité. On estime que rien qu’en Europe de l’ouest 120.000 personnes arrivent chaque année en étant achetées ou vendues. Le commerce d’êtres humains rapporte autant d’argent que le trafic de drogue ou le trafic d’armes et est nettement moins dangereux que ces derniers, les victimes ayant souvent trop peur d’aller à la police pour dénoncer leurs bourreaux. Combattre la traite et protéger les victimes est un des grands défis du XXIème siècle. Actuellement, dans la majorité des pays, après un délai de réflexion qui varie entre 30 et 90 jours, les victimes de la traite doivent faire un choix particulièrement difficile et lourd de conséquences : collaborer ou non avec les autorités afin de continuer à bénéficier d’une protection. Au Luxembourg, la “loi du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et immmigration” prévoit une autorisation de séjour pour les personnes victimes de la traite et leur accorde un délai de réflexion de 90 jours durant lequel elles ont accès à des mesures de sécurité, de protection et d’assistance. Mais à l’expiration de ce délai, la protection dont elles ont bénéficié est conditionée à leur collaboration avec les autorités, comme c’est souvent le cas dans les législations des pays européens. Traumatisées par ce qu’elles ont vécu, par les menaces proférées par leurs bourreaux contre elles-mêmes ou contre leurs proches, les victimes refusent bien souvent de témoigner. Cela n’altère en rien leur condition de victimes, et leur protection ne doit pas dépendre de leur décision de témoigner ou non. Afin de mieux protéger les victimes de la traite, le Conseil de l’Europe a adopté une Convention contre la traite des êtres humains. Le 1er février 2008 cette Convention révolutionnaire est entrée en vigueur et a été ratifiée jusqu’à présent par 26 états. Amnesty International Luxembourg, Caritas Luxembourg et ECPAT Luxembourg exhortent les pays membres du Conseil de l’Europe à ratifier la Convention contre la traite des êtres humains et à faire le nécessaire, pour s’assurer de sa mise en œuvre au niveau national. Après avoir signé cette Convention le 16 mai 2005, le Luxembourg a fait un pas important en avril 2009 en ratifiant la Convention. Deux lois importantes ont été également votées en 2009 : la loi du 13 mars 2009 relative à la traite des êtres humains et la loi du 8 mai 2009 sur l’assistance, la protection et la sécurité des victimes de la traite des êtres humains. Amnesty, Caritas et ECPAT saluent ces initiatives positives du gouvernement luxembourgeois, qui marquent un point important dans la lutte contre le phénomène de la traite. Il est à présent essentiel que soit mis sur pied le règlement Grand Ducal précisant les modalités d’application de ces lois. Une soirée de sensibilisation sur la Traite En marge de la 3ème journée européenne de lutte contre la traite des êtres humains, les Pirates productions présenteront la comédie musicale « THOROUGHLY MODERN MILLIE » du 13 au 18 octobre. Ce spectacle aborde des problèmes universels sur les relations humaines, soulignant aussi un problème beaucoup plus grave et toujours d’actualité : la traite des femmes. Amnesty et ECPAT tiendront durant les représentations un stand de sensibilisation à la problématique de la traite des êtres humains et une partie des recettes sera au profit des deux associations. Pour de plus amples informations, veuillez consulter le site web : www.pirates.lu Complément d’information : AMNESTY INTERNATIONAL LUXEMBOURG Amnesty International Luxembourg est un mouvement de personnes luttant pour les droits humains. Elle intervient au nom des victimes de violation de ces droits, en se basant sur une recherche importante et impartiale et sur le droit international. Indépendante de tout gouvernement, de toute idéologie politique, de tout intérêt économique et de toute religion, elle informe et sensibilise la population du Grand-duché sur les droits humains en général et sur des pays du monde en particulier, et suit avec attention ce qui se passe au Luxembourg. CARITAS Caritas Luxembourg s’engage pour le bien-être des hommes et des femmes, et en particulier des personnes exclues, désemparées ou démunies, quels que soient leur origine, âge, nationalité ou leur opinion philosophique ou religieuse. Les membres de la famille Caritas, regroupés au sein de la Confédération Caritas, sont à l’écoute des multiples détresses à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, cherchant à créer des synergies internes en vue d’une action efficace. Ainsi, « Caritas » constitue l’enseigne d’un travail social d’inspiration chrétienne et visant la qualité du service en faveur des personnes en détresse. ECPAT ECPAT Luxembourg a pour objet de lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Elle soutient des projets de prévention, de réhabilitation et de réinsertion en faveur des enfants vulnérables et/ou victimes d’exploitation sexuelle dans différents pays du Sud. Par ailleurs, ECPAT Luxembourg mène au Grand-Duché des actions de sensibilisation dans le cadre de la lutte contre l’exploitation sexuelle et commerciale des enfants. i Albanie, Arménie, Autriche, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, France, Géorgie, Lettonie, Ex-république yougoslave de Macédoine, Luxembourg, Malte, Moldova, Monténégro, Norvège, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Serbie, Slovaquie, Slovénie.