En réaction à la décision de la Cour suprême de confirmer son jugement en acquittant une nouvelle fois Asia Bibi des charges de blasphème et en ordonnant sa libération, Rimmel Mohydin, chargée de campagne pour l’Asie du Sud à Amnesty international, a déclaré :
« Asia Bibi doit enfin obtenir sa liberté et son calvaire doit prendre fin. Après neuf ans passés derrière les barreaux pour un crime qu’elle n’avait pas commis, il est difficile de considérer ce jugement tant attendu comme un acte de justice. Toutefois, elle devrait aujourd’hui être libre de retrouver sa famille et de vivre en sécurité dans le pays de son choix.
« Les autorités doivent aussi résister face aux manœuvres d’intimidation de la Cour suprême et enquêter sur de tels faits. Il est de leur devoir de protéger les minorités religieuses ou la vie des juges et d’autres représentants du gouvernement contre les menaces de violence.
« Ce retard choquant dans l’application des droits d’Asia Bibi ne fait que souligner la nécessité pour le gouvernement pakistanais d’abroger les lois relatives au blasphème dès que possible, ainsi que les lois qui établissent une discrimination à l’égard des membres de minorités religieuses et mettent leur vie en danger. »
Complément d’information
Asia Bibi, ouvrière agricole chrétienne, a été condamnée à mort pour blasphème en 2010. Fin octobre 2018, la Cour suprême du Pakistan l’a acquittée de toutes les charges retenues contre elle et a ordonné sa libération immédiate. En raison des pressions d’une partie de la population, et notamment de menaces de violences et de troubles, le gouvernement a fait marche arrière et a accepté d’interdire à Asia Bibi de quitter le pays jusqu’à ce que la Cour suprême examine une « requête en révision » dans le cadre de son affaire. Depuis, elle est maintenue en détention pour assurer sa protection. Le 29 janvier 2019, la Cour suprême a rejeté cette requête et confirmé son acquittement.
La loi pakistanaise relative au blasphème est rédigée en termes vagues, a une portée trop générale et est coercitive. Elle est utilisée pour réprimer les minorités religieuses, à des fins de vengeance personnelle ou encore pour justifier des violences commises par des groupes d’autodéfense. Les personnes accusées de blasphème sans aucune preuve ou sur la base de faibles éléments de preuve ont beaucoup de mal à établir leur innocence face à des rassemblements d’individus violents et en colère qui tentent d’intimider la police, les témoins, les procureurs, les avocats et les juges.