Mamane Kaka Touda ; photo : © Private

Niger. Ne laissons pas la crise du COVID 19 permettre à l’exécutif nigérien de réprimer les défenseurs des droits de l’homme actifs dans le pays

Alors que la crise du Coronavirus mobilise l’essentiel de l’attention médiatique, Amnesty Luxembourg et SOS Faim s’inquiètent du prétexte qu’elle offre au pouvoir exécutif nigérien pour mener au grand jour une répression qui se caractérise notamment  par des détentions arbitraires d’activistes engagés pour la défense des droits humains.

Lundi 16 mars 2020, dans les rues de la capitale Niamey, des Nigériens se sont soulevés pour dénoncer la corruption et notamment des détournements de fonds dans l’achat de matériel militaire. En réaction immédiate, tous les manifestants ont fait l’objet de poursuites pour « participation à une manifestation non autorisée ». Le lendemain, huit membres de la société civile nigérienne ont été arrêtés à cause de leur participation à cette initiative. La veille, la manifestation avait certes été interdite dans le cadre de la prévention du coronavirus, mais sans qu’aucune notification ne soit adressée au mouvement Tournons la page (TLP) Niger, à l’origine de cette initiative.

Parmi les personnes arrêtées figurent notamment Maïkoul Zodi et Moussa Tchangari (de l’ONG « Alternative Espaces Citoyens », partenaire de SOS Faim), qui avaient déjà été arrêtés en 2018, pour être libérés après avoir subi respectivement huit et quatre mois de détention arbitraire pour « organisation et participation à une manifestation interdite ».

Quelques semaines plus tôt, le jeudi 5 mars 2020, Mamane Kaka Touda, jeune journaliste et également membre de l’ONG « Alternative Espaces Citoyens », avait été arrêté chez lui et placé en garde à vue pour « diffusion de données tendant à troubler l’ordre public ». Son seul crime fut la publication d’un post sur le réseau Facebook alertant sur la présence d’un premier cas suspect de coronavirus au service des urgences de l’hôpital de Niamey.

Ces pressions sur les journalistes nigériens et les atteintes à la liberté d’expression qu’elles impliquent ne sont pas nouvelles. Depuis quatre ans, elles révèlent l’incapacité du gouvernement nigérien à mener un dialogue social élargi et sont le signe d’une dérive autoritariste indéniable.

Dès le 17 mars, L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme déclarait « condamner fermement cette nouvelle vague d’arrestations arbitraires au Niger » et appelait « les autorités nigériennes à respecter l’ensemble des droits garantis par les instruments internationaux et régionaux de protection des droits humains ratifiés par le Niger, en particulier s’agissant des droits aux libertés d’association, de réunion pacifique et d’expression, et à mettre fin à toute forme de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à l’encontre de l’ensemble des défenseurs des droits humains dans le pays ».

SOS Faim et Amnesty Luxembourg avaient déjà alerté le Ministère des Affaires étrangères lors des événements de 2018 et tiennent à réitérer ici leur entier soutien aux membres de la société civile nigérienne engagés pour la défense des droits humains fondamentaux et pour l’exercice d’une démocratie réelle, qui ne saurait se limiter à des échéances électorales tous les 5 ans.

Par un courrier en date du 22 avril 2020, SOS FAIM et Amnesty ont sollicité les autorités luxembourgeoises afin qu’elles mettent tout en œuvre pour ne pas cautionner par leur silence les atteintes aux droits fondamentaux par l’exécutif nigérien.

Alors que le Niger est un pays partenaire de la Coopération luxembourgeoise, le Luxembourg ne peut rester sans réagir. Il doit œuvrer à la sauvegarde du pluralisme politique et de la liberté d’expression, comme partout ailleurs dans le monde.

SOS Faim interroge M. Asselborn sur les dispositions que le Luxembourg compte prendre, afin de condamner ces violations de libertés, et sur la pression internationale que Luxembourg peut faire peser pour libérer les personnes détenues arbitrairement, qui plus est dans des conditions sanitaires qui menacent leur vie au regard de la pandémie qui sévit actuellement.

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