En réaction à l’adoption par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU d’une résolution sur le Myanmar à Genève le 27 septembre, Tirana Hassan, responsable de la réaction aux crises à Amnesty International, a déclaré : « La résolution adoptée est un grand pas en avant dans la lutte pour l’obligation de rendre des comptes au Myanmar, laissant entrevoir une possible justice pour les Rohingyas et autres minorités ethniques qui ont subi des atrocités aux mains des forces de sécurité du pays.
« Alors que le Conseil de sécurité de l’ONU s’enlise dans des considérations politiques, le Conseil des droits de l’homme relève le défi en adoptant une approche sérieuse et constructive afin d’ouvrir la voie à la justice. Il adresse un message clair de solidarité à toutes les victimes, ainsi qu’un avertissement ferme aux militaires birmans : leurs crimes ne resteront pas impunis. »
La volonté de la Chine de bloquer la résolution fut un échec – la résolution a été votée par 35 voix pour, trois contre et sept abstentions.
« Néanmoins, il est très inquiétant que la Chine ait cherché à soustraire les responsables à la justice et à l’obligation de rendre des comptes lors de ce vote. Cette action visant à entraver la justice pour les Rohingyas et autres minorités intervient alors que la Chine se livre à de graves violations des droits humains contre les Ouïghours et les minorités musulmanes sur son territoire. L’histoire jugera les dirigeants chinois sans complaisance pour leur mépris flagrant envers la justice, a déclaré Tirana Hassan.
« Le nouveau mécanisme mis sur pied sera chargé de réunir et de préserver des preuves, et de préparer des dossiers en vue de poursuites judiciaires contre les responsables présumés de crimes parmi les plus graves relevant du droit international.
« Si le Conseil des droits de l’homme a pris des mesures importantes dans la lutte pour la justice au Myanmar, il reste encore beaucoup à faire. Le Conseil de sécurité doit saisir la Cour pénale internationale au sujet de la situation au Myanmar. Son entêtement à ne pas le faire entache sa crédibilité en tant qu’organisme international chargé de maintenir la paix et la sécurité dans le monde. »
Complément d’information Plus de 725 000 femmes, hommes et enfants rohingyas ont fui le nord de l’État d’Arakan pour gagner le Bangladesh voisin, après que les forces de sécurité du Myanmar ont lancé une offensive systématique contre des centaines de villages rohingyas le 25 août 2017, en réaction à une série d’attaques menées contre des postes de sécurité par l’Armée du salut des Rohingyas de l’Arakan (ARSA), un groupe armé rohingya.
Amnesty International a amplement rendu compte des atrocités commises par l’armée, notamment les incendies ciblés dans les villages rohingyas, l’utilisation de mines terrestres et les crimes contre l’humanité, dont les meurtres, les viols, la torture,les tactiques destinées à affamer et les expulsions forcées, ainsi que d’autres graves violations des droits humains infligées aux Rohingyas. Elle a également recensé des crimes de guerre commis contre les minorités ethniques dans l’État kachin et dans le nord de l’État chan, où les violations se poursuivent.
Le 18 septembre 2018, la Mission d’établissement des faits des Nations unies sur le Myanmar a présenté son rapport final au Conseil des droits de l’homme, apportant de nouveaux éléments qui attestent de crimes commis par l’armée au Myanmar. La Mission a demandé que les principaux généraux birmans et d’autres responsables présumés fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et génocide.
Cette semaine, Amnesty International a remis plus de 90 000 signatures de citoyens du monde entier aux membres du Conseil des droits de l’homme à Genève, demandant la création d’un mécanisme d’obligation de rendre des comptes pour les atrocités commises au Myanmar. En outre, elle a invité les dirigeants mondiaux lors de l’Assemblée générale à faire en sorte que les généraux de l’armée birmane rendent compte de leurs actes.