Manifestations pour la justice raciale suite à la mort de George Floyd lors d'un violent affrontement avec la police dans le Minnesota. Centre de Washington, DC, États-Unis, 3 juin 2020. © Amnesty International (Photo: Alli Jarrar)

De nouvelles images satellite révèlent les terribles ravages causés par les violences en République centrafricaine


L’analyse d’experts des nouvelles images satellite de la République centrafricaine obtenues par Amnesty International révèle les terribles ravages causés par les atteintes aux droits humains imputables aux groupes armés et aux forces de sécurité, emportés dans une spirale de la violence.


Sur ces images, dont certaines ont été prises début novembre, on peut voir que 485 habitations ont été incendiées à Bouca, et que de nombreuses personnes déplacées sont rassemblées près de la ville de Bossangoa, la population fuyant les violences qui s’y déroulent.

« Si ces nouvelles images offrent un aperçu des dégâts au niveau de l’habitat et de la vie civique visibles depuis l’espace, il est tout à fait impossible de saisir depuis un satellite l’ampleur réelle des répercussions de la crise en termes humains, a indiqué Aster van Kregten, directrice adjointe du programme Afrique d’Amnesty International.

« Les autorités centrafricaines et la communauté internationale doivent agir, de toute urgence, pour maîtriser les groupes armés responsables des violations généralisées des droits fondamentaux – susceptibles de s’apparenter à des crimes contre l’humanité – qui se propagent dans toute la République centrafricaine. »

Le 9 septembre 2013, des civils armés connus localement sous le nom d’Anti Balaka ont attaqué un quartier musulman de la ville de Bouca située à 98 kilomètres à l’est de Bossangoa. Ils ont tué au moins trois personnes et incendié des habitations appartenant à des musulmans.

Le même jour, des soldats de la Seleka, coalition de groupes armés qui a lancé une offensive contre le gouvernement de l’ancien président François Bozizé en décembre 2012 avant de s’emparer du pouvoir en mars 2013, se sont livrés à des représailles contre des chrétiens. Ils ont tué au moins 10 personnes et incendié des habitations appartenant à des chrétiens. Plus tard dans la journée, un commandant de la Seleka a accusé un travailleur humanitaire chrétien employé par le gouvernement d’avoir participé aux attaques visant les musulmans et l’a sommairement exécuté.

En comparant les images satellite de Bouca prises le 27 avril 2012 et le 2 novembre 2013, on peut voir les destructions causées par des incendies importants dans les quartiers du centre et de l’est de la ville, concernant quelque 485 habitations. Un vaste secteur a été gravement touché.

L’insécurité aggrave la crise en matière de déplacements de populations, exacerbée depuis l’intensification du conflit armé en décembre 2012. Plusieurs centaines de milliers de civils ont été déplacés, tandis que plus de 60 000 Centrafricains se sont réfugiés dans les pays voisins.

Selon des sources humanitaires en République centrafricaine, plus de 30 000 personnes déplacées se trouvaient à Bossangoa, en raison des combats qui ont éclaté en septembre 2013. Sur les images satellite de la région, prises le 23 octobre, on note l’apparition de structures ressemblant à des tentes et de personnes cherchant refuge dans la nature. Craignant pour la sécurité de ces personnes déplacées, Amnesty International préfère ne pas publier ces images pour l’instant.

Les nouvelles images satellite corroborent les conclusions publiées fin octobre par Amnesty International dans un rapport intitulé CAR: Human rights crisis spiralling out of control . Ce document met en lumière l’ampleur sans précédent des violations des droits humains commises dans tout le pays par la Seleka, coalition de groupes armés qui a lancé une offensive contre le gouvernement de l’ancien président François Bozizé début décembre 2012, avant de s’emparer du pouvoir en mars 2013.

Depuis décembre 2012, des centaines de civils ont été tués délibérément, tandis que des milliers ont été victimes de torture et d’autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, notamment de viols et d’autres violences sexuelles. Certains de ces agissements semblent cibler des groupes religieux ; ce sont surtout les membres musulmans de la Seleka qui s’en prennent à des églises et à des personnes qu’ils pensent chrétiennes. Parallèlement, des milices chrétiennes ont attaqué des musulmans.

Amnesty International a appelé les autorités centrafricaines à condamner publiquement et sans équivoque toutes les violations des droits humains commises par les forces de sécurité et les groupes armés, à traduire en justice les auteurs présumés, et à accorder des réparations aux victimes. L’Union africaine et les Nations unies doivent également se mobiliser et mettre en place des mesures coordonnées et efficaces afin de protéger les civils et de rétablir la loi et l’ordre public dans le pays – pour mettre enfin un terme à cette crise humanitaire et des droits humains dévastatrice.

« On a laissé ces violences s’intensifier depuis trop longtemps, au point de devenir incontrôlables. Il faut tout faire pour que les civils centrafricains soient réellement protégés », a conclu Aster van Kregten.

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