Amnesty International accuse les autorites Turques d’avoir commis de graves violations des droits humains lors des manifestations du parc Gezi.

Luxembourg, 2 octobre 2013. Les autorités turques ont commis de très nombreuses violations des droits humains lorsque le gouvernement a tenté d’écraser le mouvement de protestation du parc Gezi cet été, a constaté Amnesty International dans son nouveau rapport rendu public le 2 octobre. Afin de faire le point sur les droits humains en Turquie, Amnesty International Luxembourg accueillera le 24 octobre prochain Murat Cekic, directeur d’Amnesty International Turquie, qui participera au lancement de la traditionnelle campagne bougies.
Dans son rapport, l’organisation décrit notamment les excès dont la police s’est rendue coupable pendant les manifestations, en soulignant que ces agissements n’ont fait l’objet d’aucunes poursuites tandis que les personnes ayant manifesté ont, elles, été harcelées et inculpées.
« La répression du mouvement de protestation du parc Gezi a donné lieu à des violations des droits humains à très grande échelle, a déclaré Andrew Gardner, spécialiste de la Turquie à Amnesty International.

Le droit de se réunir pacifiquement a été systématiquement bafoué et les violations du droit à la vie, à la liberté et à ne pas être torturé et maltraité ont été nombreuses. »

Le « programme de démocratisation » annoncé par le Premier ministre turc lundi 30 septembre ne résout pas le problème de ces violations et ne propose aucune mesure sérieuse pour éviter qu’elles ne se reproduisent à l’avenir.

De graves violences impunies
Intitulé Gezi Park protests:

Brutal denial of the right to peaceful assembly in Turkey, le rapport d’Amnesty International décrit comment les tirs de balles réelles, de gaz lacrymogène, de canon à eau, de balles en caoutchouc ainsi que les coups ont fait plus de 8 000 blessés là où les manifestations avaient lieu. La mort d’au moins trois manifestants était liée à l’utilisation d’une force excessive de la part de la police.

L’organisation a observé des manifestations à Istanbul et Ankara et interrogé dans quatre villes turques de nombreuses personnes qui avaient été blessées par la police, arrêtées illégalement et frappées ou agressées sexuellement pendant leur détention.
Le rapport montre que :

• une personne est morte et de nombreuses autres ont été blessées du fait que des manifestants et d’autres personnes ont été frappés avec violence ;

• la police a fréquemment tiré des balles en caoutchouc en visant la tête ou le haut du corps ;

• des grenades lacrymogènes ont été tirées directement sur les manifestants, les passants et parfois en direction de bâtiments d’habitation ou médicaux, provoquant des centaines de blessures et, selon des témoins, au moins un décès ;

• des irritants chimiques ont été ajoutés aux réservoirs des canons à eau ;

• des policiers ont infligé des violences sexuelles à des manifestantes ;

• des balles réelles ont été utilisées, tuant un manifestant.

Il apparaît déjà que la grande majorité des violences policières resteront impunies, tandis que les personnes ayant organisé les manifestations ou y ayant participé ont été vilipendées et violentées et font maintenant l’objet de poursuites injustes ou disproportionnées. Les personnes ayant aidé des manifestants ou diffusé des informations sur les manifestations – médecins, avocats, journalistes et même des commerçants – ont été menacées et harcelées.

« Des centaines de personnes sont menacées de poursuites en justice simplement pour avoir participé aux manifestations, en l’absence de tout élément attestant qu’elles aient pris part à des actes violents, a déclaré Andrew Gardner. Et un grand nombre de personnes accusées d’avoir organisé les manifestations font l’objet d’une instruction en vertu de la loi antiterroriste. »

« Le gouvernement turc doit apprendre à tolérer les opinions divergentes exprimées par le biais de manifestations dans la rue, et veiller à ce que les policiers disposent de l’équipement, de la formation et des instructions pour assurer le maintien de l’ordre en toute légalité en cas de mouvement de protestation. »

Interdiction des exportations ou des transferts de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc vers la Turquie

Amnesty International appelle également les gouvernements et les fournisseurs de matériel antiémeute à interdire immédiatement les exportations ou les transferts vers la Turquie. Cette interdiction devrait concerner notamment le gaz lacrymogène et le gaz poivre, ainsi que les balles en caoutchouc et autres projectiles à impact cinétique.

Une telle interdiction devrait rester en vigueur jusqu’à ce que les autorités autorisent l’ouverture d’une enquête indépendante et impartiale sur les allégations d’usage arbitraire ou excessif de la force, et fassent la preuve de leur engagement à n’utiliser ce matériel que dans le strict respect des normes internationales.
Conférence-débat au Luxembourg

Afin de débattre sur les conséquences en matière de droits humains de la répression policière en Turquie, la section luxembourgeoise d’Amnesty International organise le 24 octobre prochain en ouverture de sa traditionnelle campagne bougies à 19h 30 une conférence-débat avec Murat Cekiç, directeur d’Amnesty International Turquie. L’évènement aura lieu dans les locaux de la section au 23, rue des Etats-Unis à Hollerich.

Pour rappel, la Chambre des députés luxembourgeoise a adopté en juin dernier une motion pour « signifier au gouvernement turc l’importance qu’attache le Luxembourg au Respect des droits de l’Homme et plus particulièrement des libertés de réunion de manifestation pacifique, d’expression et de la presse. »