Chaque jour, dans le monde, des personnes prennent la décision la plus difficile de leur existence : partir de chez elles dans l’espoir de trouver une vie meilleure et plus sûre. Elles s’engagent sur les routes parfois mortelles de l’exil pour quitter la Syrie, l’Afghanistan, le Myanmar, l’Erythrée, la Somalie, l’Irak, ou encore le Honduras, El Salvador ou le Guatemala, etc. Les enfants, surtout s’ils sont isolés, sont particulièrement vulnérables.
Pourquoi quitte-t-on son pays ?
Il peut être trop difficile ou trop dangereux de rester dans son pays, ce pour de multiples raisons. Ces personnes fuient la violence, la guerre, la faim, l’extrême pauvreté ; elles peuvent aussi être amenées à partir en raison de leur genre ou de leur orientation sexuelle, ou encore pour échapper aux effets du changement climatique ou aux retombées d’une catastrophe naturelle.
Cependant, celles et ceux qui quittent leur pays ne sont pas tou·te·s en danger. Il existe de nombreuses raisons qui poussent quelqu’un à aller construire sa vie ailleurs.
Exemple des réfugié·e·s de la guerre en Ukraine :
Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, des milliers de personnes ont été obligées de se déplacer et de tout quitter pour échapper à la guerre. Logements et écoles détruites, pertes d’emploi, routes impraticables, manques de nourriture ou encore de médicaments : les ukrainien·ne·s n’ont pour la plupart pas eu d’autre choix que de fuir massivement, souvent en passant les frontières de l’Union Européenne. Aujourd’hui, le nombre de personnes ayant fui l’Ukraine vers l’Europe depuis le début du conflit s’élève à plus de 7,5 millions (UNHCR, Government), créant ainsi la plus grave crise des réfugié·e·s en Europe depuis la Seconde Guerre Mondiale.
Des issues incertaines
Pour les personnes qui y parviennent, il est fréquent qu’elles soient placées dans des centres de détention aux conditions inhumaines : surpeuplement, tortures, humiliations, agressions sexuelles, faim, absence de soins, etc. Pour les migrant·e·s, l’issue restera incertaine jusqu’à l’obtention d’une protection. Beaucoup de gouvernements proclament que le droit d’asile est essentiel mais trop peinent à le garantir.
Définitions : réfugié·e·s, demandeurs·euses d’asile et migrant·e·s
Les termes « réfugié·e », « demandeur·euse d’asile » et « migrant·e » servent à décrire des personnes en mouvement, qui ont quitté leur pays et traversé des frontières.
Les termes « migrant·e » et « réfugié·e » sont souvent utilisés l’un pour l’autre mais il est important de les distinguer car ils présentent une différence juridique.
Qu’est-ce qu’une personne réfugiée ?
En droit international, le terme de « réfugié·e » est utilisé pour désigner une personne qui, en cas de retour dans son pays, craint « avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe ou de ses opinions politiques ». Être reconnu comme réfugié·e passe souvent par le dépôt d’une demande d’asile individuelle auprès d’un État.
Qu’est-ce qu’une personne demandeuse d’asile ?
Un·e demandeur·euse d’asile est une personne qui sollicite une protection internationale hors des frontières de son pays, mais qui n’a pas encore été reconnue comme réfugié·e.
Demander l’asile est un droit humain, ce qui signifie que tout le monde devrait être autorisé à entrer dans un autre pays pour y demander l’asile. La procédure d’asile devrait être équitable et efficace, et les demandeurs·euses devraient être en mesure d’entrer en contact avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) s’ils en ont besoin ou le souhaitent.
Toute personne en passe d’être envoyée vers un autre pays devrait être traitée équitablement et avec dignité. Le principe juridique de « non-refoulement » signifie que personne ne devrait être contraint de retourner dans un pays où sa vie ou son bien-être est susceptible d’être menacé.
Exemple des demandeurs d’asile haïtien·ne·s aux États-Unis :
Les conditions de vie en Haïti sont, au fil des années, devenues de plus en plus difficiles pour la population. Outre deux tremblements de terre meurtriers à dix ans d’intervalle, c’est également un chaos politique, des enlèvements, une insécurité alimentaire, une insécurité générale, une pénurie de carburant, et bien plus encore qui ont pris place en Haïti. C’est pourquoi des dizaines de milliers d’Haïtien·ne·s décident de tout quitter pour demander l’asile, beaucoup aux États-Unis. Or, c’est en arrivant à la frontière, à la recherche d’une protection internationale, que les choses empirent : les Haïtien·ne·s font en effet l’objet d’un racisme anti-noir·e·s trouvant sa source dans des structures et des pratiques qui sont apparues avec le colonialisme et l’esclavage. Ces personnes ne sont, à leur arrivée, et souvent jusqu’à leur retour, jamais traitées dans le respect des droits humains, notamment lorsqu’elles se voient imposer des entraves aux chevilles ou des menottes à bord des vols lors de leur expulsion du pays.
Qu’est-ce qu’une personne migrante ?
Il n’existe pas de définition juridique reconnue au niveau international. À l’instar de la plupart des organismes et organisations, Amnesty International considère que les migrant·e·s sont des personnes qui vivent hors de leur pays d’origine mais ne sont ni des demandeurs·euses d’asile ni des réfugié·e·s.
Certains migrant·e·s quittent leur pays pour travailler, faire des études ou rejoindre des membres de leur famille, par exemple. D’autres y sont incité·e·s par la pauvreté, les troubles politiques, la violence de bandes criminelles, les catastrophes naturelles ou d’autres problèmes graves.
De nombreuses personnes, bien que ne remplissant pas les critères juridiques qui feraient d’elles des réfugié·e·s, pourraient être en danger si elles rentraient chez elles.
Il est important de comprendre que, même si des migrant·e·s s ne fuient pas de persécutions, leurs droits humains doivent malgré tout être protégés et respectés.
Exemple des migrant·e·s au Qatar :
Nombreuses sont les personnes ayant décidé de se rendre au Qatar dans l’espoir de trouver un travail davantage rémunéré qu’il ne l’aurait été dans leur pays d’origine. Ces emplois se trouvent très souvent dans le secteur du bâtiment et notamment depuis 2010 avec l’annonce de la tenue de la Coupe du monde de football nécessitant la construction de multiples infrastructures comme des stades mais aussi des routes, des chemins de fer ou encore des hôtels. C’est ainsi que des milliers de personnes ont décidé de quitter leur pays d’origine, souvent dans l’espoir d’offrir une meilleure qualité de vie à leur famille restée sur place. Cependant, les conditions de travail offertes sur place sont déplorables : pas de repos, travail sous des chaleurs extrêmes, conditions de logement insalubres, racisme et salaires non payés, … Des milliers de personnes ont ainsi trouvé la mort depuis le début des travaux, et ce, dans le non-respect le plus total des droits humains.
La législation
Les migrant·e·s, les réfugié·e·s et les demandeurs·euses d’asile disposent de droits protégés par le droit international, quels que soient la manière dont ils arrivent dans un pays et le but de leur déplacement. Ils ont les mêmes droits que quiconque et jouissent de surcroît d’une protection particulière, en vertu des textes suivants :
- la Déclaration universelle des droits de l’Homme, qui dispose à son article 14 : « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays » ;
- la Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés (1951, et son Protocole de 1967), qui interdit de renvoyer des réfugiés dans des pays où ils risquent d’être persécutés ;
- la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990) qui protège les migrants et leurs familles ;
- les instruments juridiques régionaux relatifs aux réfugiés, y compris la Convention de l’Organisation de l’unité africaine (1969), la Déclaration de Carthagène (1984), le régime d’asile européen commun et le règlement Dublin.
Ce que demande Amnesty International
Nous faisons campagne pour un monde dans lequel chacun et chacune puisse jouir de ses droits humains, indépendamment de sa situation. Amnesty International défend les droits humains des réfugié·e·s, des demandeurs·euses d’asile et des migrant·e·s depuis des dizaines d’années.
Les personnes ne sont pas en cause
On compte quelque 25,4 millions de réfugié·e·s dans le monde. Beaucoup de personnes se sentent submergées par le nombre et considèrent que les mouvements transfrontières alimentent une crise mondiale. À Amnesty International, nous pensons qu’il ne s’agit pas d’un problème de chiffres. Ce ne sont pas les personnes qui sont en cause, mais plutôt les raisons qui poussent ces personnes et ces familles à franchir des frontières et la réaction irréaliste et à courte vue des responsables politiques.
Dans le cadre de nos campagnes, nous faisons pression pour que les États assument leur responsabilité commune de protéger les droits des réfugié·e·s, des demandeurs·euses d’asile et des migrant·e·s. Les gouvernements doivent veiller à ce que toutes ces personnes soient en sécurité et ne soient pas torturées, discriminées ni abandonnées à la pauvreté, soient protégées de l’exploitation et des atteintes commises par leurs employeurs, les trafiquants et les passeurs.
Nos actions ont pour but de dénoncer les violations des droits des réfugié·e·s et des migrant·e·s et de les faire valoir en toutes circonstances.
Nous appelons ainsi les autorités à :
- Respecter leur obligation de solidarité en accueillant les personnes réfugiées et en venant en aide aux pays qui en accueillent le plus grand nombre.
- Veiller à ce que toute personne puisse avoir accès au droit de solliciter l’asile et que nul ne soit renvoyé dans son pays d’origine quand il risque d’y subir de graves atteintes aux droits humains
- Toute personne, réfugiée ou migrante, doit avoir accès à ses droits fondamentaux, notamment l’accès aux soins et à l’éducation. L’État doit les protéger afin qu’elles ne soient pas victimes de l’exploitation ou de travail forcé.
Compassion sanctionnée : la solidarité devant la justice
Ces dernières années, dans plusieurs pays, les défenseur·e·s des droits humains et les organisations de la société civile ayant apporté une aide à des personnes réfugié·e·s ou migrant·e·s ont dû faire face à des poursuites judiciaires infondées, à des restrictions abusives de leurs activités, à des manœuvres d’intimidation et de harcèlement et à des campagnes de dénigrement.
Dans toute l’Europe, des centaines de personnes sont sanctionnées pour avoir simplement aidé des personnes dans le besoin ou les avoir soutenues : donner de la nourriture ou du thé chaud, proposer un abri, aider des personnes dans les montagnes, faire des appels de phares, sauver des vies en mer, etc. Des dizaines de procédures judiciaires ont été ouvertes contre des ONG et des personnes en Italie, en Grèce, en France et en Suisse. La criminalisation de la solidarité touche des organisations de la société civile et des personnes partout en Europe, notamment des personnes retraitées, des guides de haute montagne, des prêtres, de jeunes militant·e·s, des capitaines de navires, entre autres. Elle touche également les réfugié·e·s et les migrant·e·s qui osent aider leurs ami·e·s et d’autres personnes en mouvement.
Aux États-Unis, le gouvernement américain a tenté de punir celles et ceux qui protègent courageusement la vie et les droits des migrant·e·s, réfugié·e·s et des personnes demandant l’asile à la frontière entre les États-Unis et le Mexique : détentions, interrogatoires prolongés, restrictions de voyage, fouilles de leurs appareils électroniques. Aujourd’hui, ce phénomène s’est intensifié jusqu’à devenir une véritable campagne illégale justifiée par des motifs politiques et basée sur l’intimidation, la menace, le harcèlement et les poursuites pénales à l’encontre de défenseur·e·s des droits humains.
Amnesty International appelle la solidarité à être saluée et non pas sanctionnée.
Voir tous nos rapports sur les réfugié·e·s, les demandeurs·euses d’asile et les migrant·e·s ici.
Collectif réfugiés
De par notre statut de membre du Collectif Réfugiés Luxembourg – Lëtzebuerger Flüchtlingsrot (LFR), les activistes d’Amnesty prennent régulièrement part aux rencontres avec les autorités et avec les représentant·e·s d’autres organisations et institutions. Cette plateforme d’organisations est active dans le domaine de la défense des droits humains et du droit d’asile. Ces organisations qui viennent en aide aux demandeurs·euses et bénéficiaires de protection internationale possèdent une expertise de terrain et entretiennent des contacts réguliers avec les concernés.