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Premier ministre russe au Luxembourg : Amnesty International interpelle sur la répression des défenseurs des droits humains en Russie

À l’occasion de la visite officielle au Luxembourg de Dimitri Medvedev, Premier ministre de la Fédération de Russie, Amnesty International Luxembourg a partagé ses inquiétudes au sujet des droits humains dans ce pays dans une lettre aux autorités luxembourgeoises. Loin de s’améliorer, la situation des droits humains en Russie, notamment la situation des défenseures des droits humains, ne cesse de se dégrader.

Obstacles à l’existence d’une organisation de la société civile

La Russie a approuvé ces dernières années plusieurs lois pour empêcher les militants des droits humains de faire leur travail.

En vertu de la Loi de 2012 sur les « agents de l’étranger », les ONG non enregistrées en Russie et recevant des financements étrangers sont considérées comme des « agents de l’étranger » si elles mènent des « activités politiques » définies en des termes 107vagues. Ceci est clairement une atteinte au droit à la liberté d’association.

Des lois telles que celle de 2013 sur la propagande homosexuelle, sont non seulement ouvertement homophobes mais restreignent le droit à la liberté d’expression comme lorsqu’elles sont utilisées pour justifier l’interdiction des Marches des Fiertés. Enfin, ces lois permettent d’engager des poursuites contre toute personne menant des activités de plaidoyer, d’éducation et de soutien liées à la sexualité, à l’identité de genre et aux droits en matière de sexualité et de procréation.

En outre, la « Loi sur les organisations indésirables » de 2015 donne au procureur général ou à ses adjoints le pouvoir de déclarer une organisation étrangère ou internationale « indésirable » s’ils considèrent que ses activités représentent une menace pour « l’ordre constitutionnel, la capacité de défense et la sûreté de l’État ». Cette loi prévoit des sanctions pénales et administratives contre les personnes prenant part à ces activités et a été utilisée pour museler les voix dissidentes, entravant ainsi la liberté d’expression des organisations indépendantes de la société civile russe.

Des défenseurs des droits humains injustement emprisonnés : les cas d’Oyoub Titiev et d’Oleg Sentsov

Oyoub Titiev est l’un des défenseurs des droits humains les plus courageux de Russie. Depuis plus de neuf ans il dirige le bureau de l’ONG Memorial à Grozny qui recueille des informations sur les violations des droits humains en Tchétchénie et porte assistance aux victimes. Oyoub Titiev a été arrêté le 9 janvier 2018 sur la base d’accusations de détention de stupéfiants forgées de toutes pièces. Depuis, il est en détention provisoire en l’attente de son procès qui aura lieu le 11 mars. Il risque jusqu’à 10 ans d’emprisonnement s’il est déclaré coupable. Oyoub Titiev  est uniquement poursuivi  en raison de son engagement pacifique pour la défense des droits humains en Tchétchénie. Il s’agit d’un prisonnier d’opinion.

Le réalisateur ukrainien Oleg Sentsov purge une peine de 20 ans de réclusion après avoir été condamné à l’issue d’un procès inique sur la base d’accusations motivées par des considérations politiques. En effet, il s’est opposé activement à l’annexion de la Crimée par la Russie. Depuis sa condamnation, Oleg Sentsov a été transféré dans plusieurs prisons en Russie. Sa dernière destination est une colonie pénitentiaire à Labytnangi, dans l’Arctique russe. Après plusieurs mois passés dans ce climat extrême, sa santé se détériore.

Violences homophobes en Tchétchénie en 2018 

Fin décembre 2018, environ 40 personnes soupçonnées d’être gays ou lesbiennes ont été détenues dans un bâtiment gouvernemental à Argun, où elles ont été soumises à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements. Au moins deux personnes seraient mortes des suites d’actes de torture mais le nombre réel de victimes pourrait être plus élevé. La Fédération de Russie est tenue par le droit international relatif aux droits humains d’interdire la discrimination, d’enquêter sur les crimes haineux et de traduire leurs auteurs présumés en justice.

Au vu des informations précédentes, nous avons demandé aux autorités luxembourgeoises de faire de la question des droits humains un élément central dans de leurs réunions avec les autorités russes et de les encourager à :

  • Adopter ou modifier des lois afin de garantir le droit à la liberté d’association.
  • Reconnaître l’importance des organisations de la société civile et des défenseurs des droits humains et leur contribution à l’avancement des droits humains. 
  • Libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers et prisonnières d’opinion détenu·e·s pour le seul fait d’avoir exercé leurs droits humains.
  • Diligenter une enquête efficace et approfondie sur les informations faisant état de placements en détention, d’actes de torture et d’homicides motivés par des considérations homophobes en Tchétchénie.