L’exécution de deux hommes condamnés pour des charges ne relevant pas de la législation relative au terrorisme marque une progression préoccupante et dangereuse de l’application de la peine capitale au Pakistan depuis la levée du moratoire en décembre dernier, a déclaré Amnesty International.
Muhammad Riaz et Muhammad Fiaz ont été pendus le 13 février au matin à la prison centrale de Mirpur, en Azad Cachemire. Les deux hommes avaient été déclarés coupables du meurtre du fils du président du barreau de la Cour suprême, commis en 2004, et condamnés à mort en 2005.
Le Pakistan a levé son moratoire sur les exécutions le 17 décembre 2014, au lendemain du massacre perpétré dans une école de Peshawar, pour les personnes condamnées par des tribunaux antiterroristes pour des infractions liées au « terrorisme ». Toutefois, les pendaisons du 13 février sont les premières exécutions de prisonniers condamnés par des juridictions de droit commun.
« Les exécutions qui ont eu lieu aujourd’hui traduisent une progression préoccupante et dangereuse dans l’application de la peine de mort au Pakistan depuis la levée du moratoire. Le gouvernement semble être allé à l’encontre de la ligne de conduite qu’il s’était lui-même fixée et qui consistait à n’exécuter que les personnes condamnées au titre de la législation antiterroriste », a déclaré David Griffiths, directeur adjoint du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.
« Vingt-quatre personnes ont été mises à mort par le gouvernement depuis décembre dernier. Cette série d’exécutions doit immédiatement prendre fin. Le gouvernement doit réinstaurer un moratoire sur la peine de mort en vue de son abolition. Le nombre de condamnés à mort au Pakistan est l’un des plus élevés au monde et les vies de plus de 8 000 personnes sont menacées. »
Muhammad Riaz et Muhammad Fiaz n’ont pas eu droit à un procès équitable. Le recours qu’ils avaient formé devant la Cour suprême a été rejeté en 2006 pour des raisons de procédure : aucun avocat ne voulait représenter les deux hommes ou se présenter en leur nom, de crainte d’être radié du barreau ou de subir d’autres représailles de la part du barreau de la Cour suprême.
« Le système judiciaire pakistanais présente de graves déficiences. Le recours fréquent à la torture pour obtenir des “aveux”, l’accès insuffisant à une aide juridique et les longues périodes de détention sans inculpation ne sont que quelques-unes de nos préoccupations. La peine de mort constitue invariablement une violation des droits humains, mais les vives inquiétudes en matière d’équité des procès dans le pays rendent son utilisation encore plus dérangeante », a expliqué David Griffiths.
Amnesty International s’oppose à la peine de mort dans toutes les affaires et en toutes circonstances, quelles que soient la nature du crime commis, la personnalité de son auteur ou la méthode d’exécution utilisée par l’État.
L’organisation considère que la peine capitale viole le droit à la vie tel que reconnu par la Déclaration universelle des droits de l’homme et constitue le châtiment le plus cruel, le plus inhumain et le plus dégradant qui soit.