Nos récents succès contre la torture

En mai 2014 nous lancions la campagne Stop Torture. Son objectif : obliger les gouvernements du monde entier à mettre en place des garanties effectives contre la torture et à les respecter, en mettant l’accent sur quatre pays. L’ensemble de notre mouvement s’est mobilisé dans ce but. Retour sur les succès et les temps forts de la campagne.

Cette campagne s’est focalisée sur quatre pays dans lesquels la torture est monnaie courante : le Maroc, le Mexique, le Nigéria et l’Ouzbékistan.

Maroc: un fort écho médiatique pour créer le débat

Mai 2014 : le lancement de la campagne Stop Torture a eu un retentissement médiatique considérable au Maroc, ce qui a permis de sensibiliser la population mais aussi de susciter le débat. Même des journaux aux tendances conservatrices se sont fait l’écho de nos recommandations  (exemple : Assabah).

Novembre 2014 : quelques mois après le lancement de la campagne, le gouvernement marocain ratifie le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture. Il doit maintenant mettre en place un mécanisme national efficace chargé de contrôler les lieux de détention.

Automne 2015 : dans le contexte de la réforme du code de procédure pénale, notre travail de pression  pousse la commission nationale des droits humains du Maroc (CNDH) à suivre nos recommandations, notamment celle sur la présence obligatoire d’un avocat lors des séances d’interrogatoires. La CNDH ne se penche généralement pas sur les questions relatives à la torture, sujet très sensible au Maroc.

Mexique: de meilleures procédures d’enquête pour combattre l’impunité

Décembre 2014 : la Cour suprême publie un protocole spécial sur la torture à destination des juges et du personnel du secteur judiciaire. Ce protocole cite notamment des passages de notre rapport « Hors de toute mesure » sur la torture dans le pays.

Février 2015 : un juge informe Claudia Medina, victime de torture soutenue par Amnesty international, que la dernière charge retenue contre elle (détention illégale d’arme) est abandonnée car le seul élément de preuve produit – un rapport déposé par les fusiliers marins – était un tissu de mensonges.

Le juge a en effet confirmé qu’après son arrestation, Claudia a été torturée et agressée sexuellement par des militaires qui l’ont forcée à s’accuser elle-même d’infractions en relation avec des stupéfiants. Les faits avaient eu lieu le 7 août 2012 dans une caserne des fusiliers marins de l’État de Veracruz, dans l’est du pays.

Avant, je marchais dans la rue en pensant que j’allais être arrêtée et torturée comme avant. Mais plus maintenant. Je vais marcher la tête haute et dire ‘je suis innocente et j’ai toujours dit la vérité’. »  Claudia après l’annonce de l’abandon des charges.

Août 2015 : le bureau fédéral du procureur général approuve un nouveau protocole national pour enquêter sur les allégations de torture. Il est en vigueur depuis. 

Nigéria: La torture enfin criminalisée

Décembre 2014 : la police nigériane publie un manuel pratique sur les droits humains qui établit des standards à respecter par les officiers de police et les méthodes à appliquer.

2015 : le comité national contre la torture commence à visiter des centres de détention.

Mai 2015 : le gouverneur sortant de l’État du Delta du Niger annonce dans la soirée du 28 mai qu’il accorde la grâce totale à Moses Akatugba. Moses avait été arrêté à 16 ans pour le vol de trois téléphones portables, torturé par la police nigériane puis condamné à mort sur la base de ses « aveux » obtenus sous la contrainte. Il se trouvait dans le quartier des condamnés à mort depuis 10 ans.

Je suis bouleversé. Je remercie Amnesty et ses militants pour leur immense soutien qui m’a permis de sortir vainqueur. »  Moses Akatugba après l’annonce de sa libération

Juin 2015 : les parlementaires nigérians adoptent une loi anti-torture. Celle-ci doit maintenant être examinée par le président de la République. La torture n’était jusque-là pas considérée comme un crime aux termes du droit nigérian. 

Ouzbekistan: Soutien et solidarité pour les victimes de torture et leurs familles

Octobre 2014 : le Parlement européen adopte une résolution appelant l’Ouzbékistan à éliminer la torture et à permettre une visite du rapporteur spécial. Ce dernier n’a encore jamais été autorisé à mener une mission d’enquête dans le pays.

Novembre 2015 : à l’issue du dialogue entre l’Union Européenne et l’Ouzbékistan, le Service européen pour l’action extérieure appelle publiquement l’Ouzbékistan à libérer les défenseurs des droits humains emprisonnés dans le pays, et condamne fermement l’usage de la torture. 

Les défenseurs des droits humains et les familles des victimes se sont sentis soutenus et encouragés par les actions de solidarité menées par les membres d’Amnesty International.

Ancien fonctionnaire à la Défense, Erkin Musaev travaillait pour les Nations unies quand il a été placé en détention où il a été violemment torturé. Après trois procès, il a été condamné à 20 ans de prison pour « trahison » et « abus de pouvoir ». Erkin, son avocat et sa famille ont porté plainte pour dénoncer ces actes et sa détention illégale.

Bien qu’il ait enduré beaucoup de choses terribles, Erkin ne baisse pas les bras. Il vit dans l’espoir d’un avenir meilleur et s’imagine, une fois qu’on lui aura rendu sa liberté, apporter lui aussi son aide et son soutien aux personnes qui ont survécu aux horreurs de l’injustice. »  Le père d’Erkin (juillet 2014)

Une mobilisation mondiale

Plus de 50 000 signatures récoltées en France pour Saman Naseem, plus de 100 000 signatures ont été collectées dans le monde, ce jeune iranien arrêté et torturé à 17 ans puis condamné à mort. Grâce à la mobilisation, il a échappé de justesse à son exécution. Sa peine a été annulée et il a obtenu le droit d’être rejugé.

Des centaines de messages de solidarité envoyés à Miriam Lopez, jeune mère de famille victime de torture au Mexique. 

J’ai vu des photos sur ma page Facebook et j’avais du mal à croire qu’elles venaient vraiment du monde entier. C’est bon de savoir que toutes ces personnes connaissent mon histoire. Le fait de savoir que des gens me soutiennent, cela me fait chaud au cœur. »
Miriam Lopez

Dans plus de 60 pays du globe, des actions ont été menées par des militants d’Amnesty International à l’occasion de la journée internationale contre la torture le 26 juin 2015.