Natalia Estemirova : une autre voix s’est tue en Russie

Le 7 octobre 2006, le monde déplorait la perte tragique de la journaliste Anna Politkovskaïa, abattue par balles dans un ascenseur de l’immeuble où elle vivait à Moscou. Sa faute : avoir dénoncé, au travers de ses nombreux articles et de ses livres, les diverses atteintes aux droits humains lors du conflit en Tchétchénie mais également en Russie. Aujourd’hui, une nouvelle voix s’est tue. Le 15 juillet dernier, Natalia Estemirova, éminente défenseure des droits humains, membre dirigeante de l’ONG russe de défense des droits humains à Grozny Mémorial, travaillant dans la région Nord Caucase et amie de longue date d’Amnesty International, a été enlevée vers 8h30 à bord d’une voiture et conduite vers une destination inconnue. Plus tard dans la journée, son corps, portant des blessures par balles, fut retrouvé en république d’Ingouchie voisine. Natalia Estemirova était une femme courageuse et exemplaire, qui œuvrait sans relâche pour les droits humains. Première lauréate en 2007 du prix Anna Politkovskaïa, Natalia Estemirova travaillait depuis le début du conflit en Tchétchénie en 2000 sur les diverses violations des droits humains (torture et autres types de mauvais traitements, homicides illégaux et disparitions forcées) perpétrées dans cette région. Elle portait également assistance aux personnes déplacées et à d’autres groupes défavorisés. Bien que son assassinat ne soit pour l’instant pas revendiqué, certains de ses collègues avancent qu’elle aurait été tuée en raison de ses activités en faveur des droits humains. Tout comme pour Anna Politkovskaïa, l’avocat spécialisé dans la défense des droits humains Stanislav Markelov et la journaliste Anastassia Babourova, tous deux assassinés en début d’année, les armes ont une nouvelle fois porté un rude coup au mouvement de défense des droits humains en Russie. Ces assassinats, qu’Amnesty International dénonce avec force, sont la conséquence de l’impunité que les autorités, tant russes que tchétchènes ont laissé perdurer, et n’ont d’autre but que de museler la société civile. Dans une lettre envoyée à l’ambassadeur russe au Luxembourg, notre section a demandé aux autorités russes de déployer tous les efforts requis afin que toute la lumière soit faite sur cet événement tragique, que les responsables soient traduits en justice et qu’un terme soit enfin mis à l’impunité.