En réaction à la décision rendue le 9 juillet par un tribunal de Yangon d’inculper officiellement les journalistes de Reuters Wa Lone et Kyaw Soe Oo pour violation de la Loi relative aux secrets d’État, Tirana Hassan, directrice du programme Réaction aux crises à Amnesty International, a déclaré :
« C’est un jour sombre pour la liberté de la presse au Myanmar. La décision du tribunal de donner suite à cette affaire grotesque, motivée par des considérations politiques, a des implications à la fois très préoccupantes et très fortes pour le journalisme indépendant dans le pays.
« En enquêtant sur les opérations militaires menées dans l’État d’Arakan, Wa Lone et Kyaw Soe Oo faisaient simplement ce que les journalistes sont censés faire – dévoiler la vérité et demander aux puissants de rendre des comptes. En les inculpant au titre de cette loi draconienne, en dépit de la réprobation généralisée au niveau national et international, les autorités montrent clairement leur volonté de faire taire les voix critiques. Elles font également savoir à leurs confrères travaillant dans le pays que le fait de s’exprimer peut avoir de graves conséquences.
« Cette décision témoigne d’une régression inquiétante de la liberté de la presse au Myanmar ces dernières années. Menaces, intimidation, voire incarcération sont le lot quotidien des journalistes. Les autorités doivent protéger le journalisme indépendant et le droit à la liberté d’expression, et commencer par libérer immédiatement et sans condition Wa Lone et Kyaw Soe Oo. »
Complément d’information
Wa Lone et Kyaw Soe Oo ont été arrêtés à Yangon, la principale ville du Myanmar, le 12 décembre 2017. Les deux journalistes effectuaient alors un reportage sur les opérations militaires dans le nord de l’État d’Arakan. Ces opérations ont été marquées par des crimes contre l’humanité ciblant la population des Rohingyas, notamment des expulsions, des homicides illégaux, des viols, des actes de torture et l’incendie de maisons et de villages.
Les deux journalistes ont été détenus au secret pendant deux semaines avant d’être transférés à la prison d’Insein, à Yangon. La Loi relative aux secrets d’État – l’une des lois répressives du Myanmar – prévoit une peine maximale de 14 ans de prison.