Myanmar. Les libérations d’étudiants doivent annoncer la fin de la répression

La remise en liberté de plusieurs dizaines de manifestants et manifestantes du monde étudiant est un pas en avant pour les droits humains au Myanmar. Elle pourrait aussi préparer le terrain pour le nouveau gouvernement afin qu’il libère tous les autres prisonniers d’opinion et modifie ou abroge l’ensemble des lois qui entretiennent la pratique des arrestations arbitraires, a déclaré Amnesty International.

Le tribunal de Tharawaddy a abandonné vendredi 8 avril les charges retenues contre un grand nombre d’étudiants et étudiantes qui risquaient la prison pour le seul fait d’avoir participé, en mars 2015, à des manifestations le plus souvent pacifiques. Cette mesure a été adoptée après l’annonce faite par le gouvernement, le 7 avril, qu’il s’efforcerait de faire libérer tous les prisonniers d’opinion au plus tôt.

« La libération de la plupart des jeunes manifestants est un grand pas avant pour les droits humains au Myanmar, et nous nous réjouissons de savoir que ces hommes et ces femmes vont être désormais libres de leurs mouvements », a déclaré Laura Haigh, chercheuse d’Amnesty International sur le Myanmar.

« Cela témoigne de l’intention du nouveau gouvernement de mettre fin au cycle des arrestations et des placements en détention motivés par des considérations politiques. Nous attendons maintenant la libération de tous les autres prisonniers d’opinion, y compris les étudiants et étudiantes poursuivis devant d’autres tribunaux. Le nouveau gouvernement doit s’assurer que plus personne ne reste en prison pour ses opinions au Myanmar. »

« Certes, une libération n’est qu’une première étape : la Ligue nationale pour la démocratie (NLD) doit aussi réformer la législation répressive du pays, qui a trop longtemps servi à réprimer l’opposition. Tant que ces lois restent en vigueur, les défenseurs des droits humains et les militants, hommes et femmes, risquent d’être emprisonnés pour avoir simplement exprimé leurs opinions. Heureusement, la NLD a reconnu la nécessité d’abroger et de modifier les lois répressives, et nous nous réjouissons à la perspective de voir le gouvernement s’y atteler.

« La nouvelle équipe au pouvoir doit aussi veiller à ce que les personnes aujourd’hui amnistiées reçoivent le soutien dont elles ont besoin et soient réhabilitées, de même que les nombreuses autres qui, avant elles, ont été injustement emprisonnées. »

Complément d’information

Au moins une dirigeante et quatre dirigeants de mouvements étudiants, poursuivis devant d’autres tribunaux, sont toujours détenus dans l’attente de l’abandon des poursuites. Il s’agit de Phyoe Phyoe Aung, Lin Htet Naing (alias James), Nandar Sitt Aung, Kyaw Ko Ko et Myint Thwe Thit.

Le 24 mars 2016, Amnesty International a publié un rapport sur l’emprisonnement politique au Myanmar qui mettait en lumière l’inquiétante érosion, depuis le début de l’année 2014, des libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique constatées depuis peu dans le pays. Depuis le début de 2014, des centaines de personnes ont été arrêtées, inculpées, arbitrairement détenues ou emprisonnées dans des affaires fondées sur des considérations politiques. Parmi elles se trouvent des membres du monde étudiant qui avaient pris part à des manifestations ainsi que des militants politiques, des professionnels des médias et des défenseurs des droits humains, hommes et femmes, et en particulier des personnes militant en faveur du droit à la terre et des droits des travailleurs.

Ce rapport décrit comment les autorités ont utilisé aussi bien des lois récentes que des lois anciennes pour bâillonner l’opposition, et comment le recours à ces lois s’est accompagné d’autres tactiques pour maintenir des défenseurs des droits humains et des militants en détention ou en prison pour de longues périodes, et pour créer ainsi un climat de peur dans les milieux militants et de défense des droits humains.