Le nombre total d’exécutions est le plus bas jamais enregistré depuis 10 ans et cela pour la troisième année consécutive, souligne Amnesty International le 21 avril 2021 à l’occasion de la publication de son rapport annuel sur le recours à la peine de mort dans le monde.
Au moins 483 personnes ont été exécutées en 2020 dans 18 pays (ce chiffre ne tenant pas compte des pays où les statistiques relatives à la peine de mort sont classées secret d’État ou pour lesquels on ne dispose que d’informations très restreintes : la Chine, la Corée du Nord, la Syrie et le Viêt-Nam). Les exécutions recensées ont diminué de 26 % par rapport à 2019, où 657 ont été enregistrées ; et de 70 % par rapport au pic de 1 634 exécutions signalées en 2015. À la fin de l’année 2020, au moins 28 567 personnes se trouvaient sous le coup d’une condamnation à mort, à la connaissance d’Amnesty International.
« L’année 2020 a été marquée par un nouveau recul mondial du recours à la peine de mort, tant au niveau des exécutions que des condamnations prononcées. La chute du nombre d’exécutions résulte de la baisse enregistrée dans certains pays non abolitionnistes, notamment 3 des 4 pays les plus exécuteurs et, dans une moindre mesure, de l’interruption de ces dernières décidée dans certains cas en raison de la pandémie, » a déclaré Olivier Pirot, directeur général d’Amnesty International Luxembourg.
Le nombre de condamnations à mort recensées à travers le monde (au moins 1 477) a également diminué, avec une baisse de 36 % par rapport à 2019. Amnesty International a relevé une diminution du nombre de condamnations à mort dans 30 des 54 pays où des sentences capitales ont été recensées. Cette baisse est apparemment liée dans plusieurs cas à des retards et des reports concernant les procédures judiciaires dus à la pandémie.
« Si la pandémie de Covid-19 a contribué à réduire le nombre d’exécutions et de condamnations à mort, elle a également exacerbé les discriminations inhérentes à ce châtiment. Les restrictions sanitaires ont dans plusieurs pays eu des répercussions préoccupantes sur l’accès à un·e défenseur·e et sur le droit à un procès équitable, » a expliqué Olivier Pirot.
Alors que la tendance globale en matière de la peine de mort était au recul, certains pays n’ont pas ralenti le rythme des exécutions – l’accélérant même, dans certains cas –, ce qui témoigne d’un mépris terrifiant pour la vie humaine, comme en Égypte, où le nombre d’exécutions a triplé par rapport à 2019.Parallèlement à cela, le gouvernement de Donald Trump aux États-Unis a repris les exécutions fédérales après une pause de 17 ans, et a mis à mort 10 hommes en moins de six mois, ce qui est ahurissant. L’Inde, Oman, le Qatar et Taiwan ont également repris les exécutions en 2020.
Pour ce qui concerne les condamnations, les exceptions les plus notables à la tendance à la diminution ont été observées en Indonésie, où le nombre de condamnations à mort recensées en 2020 (117) a augmenté de 46 % par rapport à 2019 (80) ; et en Zambie, ce pays ayant prononcé 119 condamnations à mort en 2020 (soit 18 de plus qu’en 2019), ce qui représente le chiffre le plus élevé enregistré en Afrique subsaharienne.
Les cinq pays procédant au plus grand nombre d’exécutions
Comme en Chine les informations sur le nombre total d’exécutions et de condamnations à mort sont classées secret d’État, il est impossible de surveiller de façon indépendante la situation dans ce domaine. Les statistiques d’Amnesty International relatives à toutes les exécutions qui ont été recensées ne comprennent donc pas les exécutions qui ont eu lieu en Chine. Cependant, on estime que la Chine procède chaque année à plusieurs milliers d’exécutions, ce qui la classe en tête des pays où ont lieu le plus grand nombre d’exécutions, devant l’Iran (246+), l’Égypte (107+), l’Irak (45+) et l’Arabie saoudite (27). L’Iran, l’Égypte, l’Irak et l’Arabie saoudite ont été responsables à eux seuls de 88 % de toutes les exécutions recensées dans le monde en 2020.
En Égypte, le nombre d’exécutions enregistré durant l’année a triplé, le pays se classant ainsi au troisième rang mondial en 2020. Au moins 23 des personnes exécutées ont été condamnées à mort dans des affaires liées à des violences politiques et à l’issue de procès manifestement iniques, entachés par l’utilisation d’« aveux » extorqués et par d’autres graves violations des droits humains, notamment la torture et la disparition forcée. Un pic a été enregistré en octobre et en novembre, au moment où les autorités égyptiennes ont exécuté au moins 57 personnes – 53 hommes et 4 femmes.
Le nombre d’exécutions recensées en Iran a continué d’être inférieur à celui qui avait été relevé les années précédentes, mais le pays a de façon croissante utilisé la peine de mort comme arme de répression politique contre les dissident·e·s, les manifestant·e·s et les membres de minorités ethniques, en violation du droit international.
De nombreux pays dans la région Asie et Pacifique ont continué de violer le droit international et les normes connexes qui interdisent le recours à la peine de mort pour les crimes qui ne relèvent pas de l’homicide intentionnel. Des condamnations à mort ont ainsi été prononcées pour des infractions à la législation sur les stupéfiants en Chine, en Indonésie, au Laos, en Malaisie, à Singapour, au Sri Lanka, en Thaïlande et au Viêt-Nam ; pour corruption en Chine et au Viêt-Nam ; et pour blasphème au Pakistan. Au Bangladesh et au Pakistan, des sentences capitales ont été prononcées par des tribunaux qui ont été créés au titre de lois spéciales et qui suivent généralement une procédure distincte de celle des tribunaux de droit commun. Aux Maldives, cinq personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur étaient reprochés étaient toujours sous le coup d’une sentence capitale.
Les États-Unis ont été le seul pays des Amériques à avoir procédé à des exécutions en 2020. En juillet, le gouvernement de Donald Trump a procédé à la première exécution fédérale depuis 17 ans, et cinq États ont à eux seuls exécuté sept personnes.
Vers l’abolition la peine de mort
En 2020, le Tchad et l’État du Colorado, aux États-Unis, ont aboli la peine de mort, le Kazakhstan s’est engagé à l’abolir au titre du droit international, et la Barbade a procédé à des réformes afin de supprimer l’imposition obligatoire de la peine capitale.
En avril 2021, 108 pays ont déjà aboli la peine de mort pour tous les crimes, et 144 pays l’ont abolie en droit ou dans la pratique. Il faut que cette tendance se poursuive.
« Plus d’États que jamais soutiennent l’appel de l’Assemblée générale des Nations unies en faveur d’un moratoire sur les exécutions. Cependant, il faut veiller à ce que les exécutions ne reprennent pas avec plus de vigueur après la pandémie. Nous continuerons de faire campagne tant que la peine de mort n’aura pas été définitivement abolie partout et pour tous les crimes. Elle constitue une violation des droits humains, en particulier du droit à la vie et du droit de ne subir ni la torture ni des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, » a déclaré Olivier Pirot.