Les proches du pilote jordanien Maaz al-Kassasbeh, à Amman. © Muhammad Hamed. Reuters

Le meurtre d’un pilote jordanien est un acte « ignoble » mais les « exécutions en représailles » ne sont pas la solution

La violente exécution sommaire d’un pilote jordanien brûlé vif par le groupe armé se désignant sous le nom d’État islamique (EI) constitue une attaque atroce contre l’humanité, mais y répondre pas des exécutions n’est pas la solution, a déclaré Amnesty International.

La vidéo montrant Muath al Kasasbeh brûlé vif dans une cage a provoqué une onde de choc à travers le monde. Mercredi 4 février à l’aube, les autorités jordaniennes ont exécuté Sajida al Rishawi et Ziad al Karbouli, deux Irakiens liés à Al Qaïda, vraisemblablement en représailles à cet assassinat.

"L’ignoble meurtre de Muath al Kasasbeh est un crime de guerre et une attaque absolue contre les principes d’humanité les plus fondamentaux", a déclaré Philip Luther, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

"Les autorités jordaniennes sont à juste titre horrifiées par cet assassinat intolérable, mais la réponse ne doit jamais être le recours à la peine de mort, qui constitue en elle-même le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. La peine de mort ne doit pas non plus être utilisée comme un outil de vengeance. Les tactiques épouvantables de l’EI ne doivent pas alimenter un cycle meurtrier d’exécutions en représailles."

Aux termes du droit international humanitaire, retenir des personnes en otage constitue un crime de guerre et tous les détenus doivent être traités avec humanité par leurs ravisseurs.

"Le fait d’avoir tué Muath al Kasasbeh alors qu’il était enfermé dans une cage, de manière aussi brutale et orchestrée, révèle la barbarie dont un groupe comme l’EI est capable", a déclaré Philip Luther.

L’une des personnes exécutées par les autorités jordaniennes ce mercredi était Sajida al Rishawi, condamnée à mort pour sa participation à l’attentat commis en 2005 à Amman qui a fait 60 morts. La demande formulée par son avocat en vue d’obtenir un examen psychiatrique de sa cliente pour évaluer son aptitude mentale à être jugée avait été rejetée par le tribunal.

Selon un rapport présenté par le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture à l’issue de sa visite en Jordanie en 2006, elle aurait été torturée lors d’interrogatoires pendant sa détention aux mains du Département des renseignements généraux, qui a duré un mois.

Ziad Karbouli, la seconde personne exécutée mercredi matin, avait été reconnu coupable d’appartenance à une organisation illégale, de détention d’explosifs ayant entraîné la mort d’une personne et de meurtre. Son avocat a indiqué à Amnesty International qu’il avait été forcé à « avouer » sous la contrainte.

Après un arrêt des exécutions pendant huit ans, la Jordanie a recommencé à appliquer la peine de mort en décembre 2014, en exécutant 11 hommes. Amnesty International demande à ce pays d’instaurer immédiatement un moratoire officiel sur les exécutions, en vue d’abolir la peine capitale.

Muath al Kasasbeh, pilote de chasse dans l’armée de l’air jordanienne, a été capturé lorsque son avion a été abattu près d’al Raqqa, en Syrie, pendant une mission contre l’EI en décembre 2014.

L’EI a tué des dizaines d’otages depuis un an, dont le journaliste japonais Kenji Goto et un autre Japonais, Haruna Yukawa, ce dernier mois.

Amnesty International exhorte l’EI à cesser les exécutions sommaires, les enlèvements et les prises d’otages.