Les autorités iraniennes doivent immédiatement annuler la déclaration de culpabilité et la condamnation de Golrokh Ebrahimi Iraee, écrivaine et militante des droits humains qui doit commencer à purger sa peine de prison. Elle a notamment été condamnée pour " atteinte aux valeurs sacrées de l’islam ", parce qu’elle a écrit une histoire non publiée sur la pratique de la lapidation, a déclaré Amnesty International le 6 octobre 2016.
"Les charges retenues contre Golrokh Ebrahimi Iraee sont absurdes. Elle encourt des années de prison simplement pour avoir écrit une histoire, qui n’a même pas été publiée ; elle est punie pour avoir fait appel à son imagination, a déclaré Philip Luther, directeur de la recherche et du plaidoyer pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International.
" Plutôt que d’incarcérer une jeune femme parce qu’elle a exercé pacifiquement ses droits fondamentaux en dénonçant la lapidation, les autorités iraniennes devraient concentrer leurs efforts sur l’abolition de ce châtiment, qui constitue un acte de torture. Il est déplorable que l’Iran continue d’autoriser le recours à la lapidation, en invoquant comme justification la protection de la moralité. "
Le 4 octobre, Golrokh Ebrahimi Iraee a reçu un appel menaçant du Centre pour l’application des peines lui ordonnant de se présenter à la prison d’Evin afin de purger sa condamnation à six ans d’emprisonnement pour " atteinte aux valeurs sacrées de l’islam " et " diffusion de propagande contre le régime ".
La première inculpation, pour laquelle Golrokh Ebrahimi Iraee a été condamnée à cinq ans de prison, a été portée à son encontre en raison d’une fiction qu’elle avait écrite, mais qui n’a pas été publiée. Il s’agit du récit de la réaction d’une jeune femme qui regarde le film La lapidation de Soraya M (l’histoire d’une jeune femme lapidée pour adultère) et qui, de colère, brûle le Coran.
Les autorités ont découvert cette histoire le 6 septembre 2014, lorsque Golrokh Ebrahimi Iraee a été arrêtée avec son époux Arash Sadeghi sur son lieu de travail à Téhéran par des hommes qui étaient apparemment des gardiens de la révolution. Ces derniers, qui n’ont produit aucun mandat d’arrêt, ont emmené le couple à son domicile, qu’ils ont fouillé, et ils ont saisi des objets leur appartenant, notamment leurs ordinateurs portables, des carnets et quelques CD.
Ils ont ensuite transféré Arash Sadeghi, défenseur des droits humains, à la prison d’Evin à Téhéran, et Golrokh Ebrahimi Iraee dans un lieu de détention secret. Elle y a été gardée jusqu’au lendemain, avant d’être transférée dans une section de la prison qui est sous contrôle des gardiens de la révolution. Elle y a été détenue pendant 20 jours, sans pouvoir communiquer avec sa famille, consulter un avocat ni comparaître devant un juge. Elle a été placée en détention à l’isolement pendant les trois premiers jours.
Golrokh Ebrahimi Iraee a déclaré que durant ses périodes de détention, elle avait été soumise à de longues heures d’interrogatoire, alors qu’elle avait les yeux bandés et se trouvait face à un mur, et que les agents qui l’interrogeaient avaient affirmé à plusieurs reprises qu’elle allait être exécutée pour avoir " insulté l’islam ". Elle entendait clairement des agents menacer et insulter son époux dans la cellule voisine, ce qui ajoutait à sa détresse. Arash Sadeghi a plus tard déclaré avoir été soumis à la torture pendant sa détention : il a été roué de coups de pied, frappé à coups de poing à la tête, giflé et étranglé.
Golrokh Ebrahimi Iraee a été jugée lors de deux brèves audiences devant un tribunal révolutionnaire à Téhéran, sans être assistée d’un avocat. Le premier avocat qu’elle a engagé a subi des pressions pour se désister de l’affaire et le second s’est vu interdire de prendre connaissance de son dossier et de la défendre. Elle n’a pas été en mesure d’assurer sa propre défense, car la première audience était consacrée aux activités militantes de son époux, tandis que pour la seconde, elle se trouvait à l’hôpital en convalescence après une grave opération et ne pouvait donc être présente. Elle a soumis au tribunal son dossier médical, mais celui-ci a rejeté sa demande d’ajournement de l’audience.
" Le " procès " de Golrokh Ebrahimi Iraee était grotesque. Elle a été privée du droit de se défendre et sa condamnation était courue d’avance. Ce procès illustre une nouvelle fois le mépris total des autorités iraniennes envers la justice et les droits humains, a déclaré Philip Luther.
" Nous les exhortons à annuler la condamnation de Golrokh Ebrahimi Iraee et celle de son époux Arash Sadeghi, qui se trouve derrière les barreaux depuis juin pour avoir exercé sans violence ses droits à la liberté d’expression et d’association. Le gouvernement iranien, usant de méthodes impitoyables et répressives, est en passe d’écraser toute une génération de jeunes militants. "
Complément d’information
Dans leurs commentaires sur le dernier rapport du secrétaire général de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, les autorités iraniennes ont confirmé que la lapidation est le châtiment prévu par la charia (loi islamique) pour l’adultère et affirmé que ce châtiment " est efficace pour prévenir les crimes et protéger la moralité ".
Amnesty International a eu connaissance d’au moins un cas, celui de Fariba Khaleghi, qui encourt actuellement la mort par lapidation.
Amnesty International demande aux autorités iraniennes de dépénaliser les relations hétérosexuelles et homosexuelles entre adultes consentants.
Arash Sadeghi purge actuellement une peine de 15 ans à la prison d’Evin, notamment pour " diffusion de propagande contre le régime ", " rassemblement et collusion dans le but de nuire à la sécurité nationale " et " outrage au fondateur de la république islamique d’Iran ". Il a lui aussi été privé du droit de consulter un avocat. Les personnes chargées de l’interroger auraient utilisé des copies imprimées de ses messages sur Facebook et de ses courriels à des journalistes et à des défenseurs des droits humains à l’étranger, ainsi qu’à des médias tels que BBC Persian, comme " preuves " pour étayer les accusations retenues contre lui.