Manifestations pour la justice raciale suite à la mort de George Floyd lors d'un violent affrontement avec la police dans le Minnesota. Centre de Washington, DC, États-Unis, 3 juin 2020. © Amnesty International (Photo: Alli Jarrar)

Est de l’Ukraine. Attaque meurtrière contre un trolleybus à Donetsk sur fond d’effritement du cessez-le-feu

Le tir de mortier qui a touché un trolleybus et tué au moins huit – et peut-être jusque 15 – civils ce matin dans la ville de Donetsk, contrôlée par les séparatistes pro-russes, constitue probablement une violation du droit international humanitaire et doit faire rapidement l’objet d’une enquête impartiale, a déclaré Amnesty International.

« Ces morts de civils révoltantes rappellent une fois de plus ce qu’il en coûte de ne tenir aucun compte des règles du droit international humanitaire. Une enquête exhaustive, impartiale et indépendante doit être menée sur cette attaque qui pourrait constituer une atteinte aux lois de la guerre », a déclaré Denis Krivosheev, directeur adjoint du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

« Les zones civiles densément peuplées ne doivent pas être visées par des tirs de mortier. Les parties au conflit sont toutes parfaitement conscientes des très lourdes conséquences, en termes de morts de civils, qu’ont les tirs imprécis d’armes explosives contre des zones urbaines. Cette attaque témoigne d’un total mépris pour la vie des civils et pour les lois de la guerre. »

Les autorités de facto de Donetsk ont déclaré que les forces loyales à Kiev ont utilisé un lanceur de mortier mobile improvisé dans la ville pour effectuer ce tir, mais Kiev a nié toute responsabilité dans cette attaque. L’obus de mortier a touché un trolleybus qui transportait des passagers rue Kuprina, dans le quartier Leninsky, et des bâtiments des alentours ont visiblement été endommagés.

Les vidéos et les photos qui ont été publiées sur les médias sociaux dans les heures qui ont suivi montrent le trolleybus avec ses vitres brisées et sept corps à l’intérieur du véhicule, parmi lesquels des femmes et des hommes âgés. On peut également voir à proximité une voiture incendiée et des bâtiments qui n’ont plus de fenêtres. Le conducteur d’un tramway qui passait dans la rue a été blessé, de même qu’un homme qui se trouvait dans un autre véhicule. On peut aussi voir des traces d’éclats d’obus et du sang sur le véhicule et sur l’asphalte autour de lui.

Une ancienne base militaire soviétique – qui, selon des sources locales, serait utilisée par les forces séparatistes pro-russes – située à environ 500 mètres du lieu de l’attaque  pourrait avoir été la cible qui était visée. Des sources officielles ukrainiennes ont nié toute responsabilité dans cette attaque, qu’elles ont imputée aux séparatistes.

Cette attaque a eu lieu à 8 h 30, quelques heures seulement après que les forces loyales à Kiev eurent admis que les séparatistes avaient pris le contrôle de l’aéroport International de Donetsk, théâtre d’intenses combats.

Des sources à Donetsk ont indiqué à Amnesty International que cette attaque a eu lieu alors que les gens vaquaient à leurs occupations quotidiennes, et que la nuit qui a précédé avait été plus calme par rapport aux jours précédents.

Cet événement fait suite à une forte augmentation du nombre de morts de civils dans le contexte d’une intensification des combats au cours des derniers jours. On peut notamment citerl’attaque meurtrière contre un autobus à Volnovakha, le 13 janvier, qui a fait 12 morts et 16 blessés parmi la population civile.

En installant des soldats, de l’armement et d’autres types de cibles militaires dans des zones résidentielles, et en procédant depuis et contre ces sites à des tirs d’artillerie, de roquettes et de mortiers, les séparatistes pro-russes et les forces gouvernementales ukrainiennes mettent en danger les civils, en violation des lois de la guerre.

« Aucun des deux camps ne prend les précautions nécessaires, prescrites par le droit international humanitaire, pour épargner les civils. Alors que les combats s’intensifient et que le cessez-le-feu conclu en septembre 2014 s’effrite, il est plus que jamais primordial que les lois de la guerre soient respectées et que ceux qui les violent répondent de leurs actes. Des civils continueront d’être illégalement tués et blessés, en nombre de plus en plus important, tant que l’impunité persistera », a souligné Denis Krivosheev.

Amnesty International a reçu des informations inquiétantes signalant qu’une douzaines de combattants des forces loyales à Kiev faits prisonniers ont dû défiler devant la population locale sur le lieu de l’attaque de ce matin. Dans une vidéo publiée par un média on voit l’un d’eux au moins en train de recevoir des coups. Les mauvais traitements infligés à des prisonniers constituent une violation du droit international humanitaire.

Des centaines de personnes ont été tuées  depuis l’annonce du cessez-le-feu en 2014, et les deux camps se livrent à un nombre croissant d’attaques en représailles. En tout, près de 5 000 personnes sont mortes depuis que le conflit a éclaté l’an dernier.