Manifestations pour la justice raciale suite à la mort de George Floyd lors d'un violent affrontement avec la police dans le Minnesota. Centre de Washington, DC, États-Unis, 3 juin 2020. © Amnesty International (Photo: Alli Jarrar)

En permettant le renvoi des Roms vers le Kosovo, les pays du Benelux risquent de les soumettre à la persécution

Amnesty International regrette que les autorités belges, hollandaises et luxembourgeoises aient signé aujourd’hui un accord de réadmission avec le gouvernement kosovar, facilitant le renvoi vers le Kosovo, entre autres, des Roms et membres d’autres groupes minoritaires.

Ce alors même que, selon l’Organisation, les autorités kosovares sont toujours loin d’avoir pris les mesures requises en vue d’une bonne réintégration des membres de groupes minoritaires renvoyés de force par les pays d’Europe occidentale en application d’accords de réadmission.

En l’absence de mesures prises pour contrer et faire face à la discrimination chronique et systématique dont sont victimes les Roms au Kosovo, Amnesty International est d’avis que les renvoyer là-bas pourrait les exposer à la persécution en violation du principe du non-refoulement.

« Presqu’un an après l’introduction d’une législation sur la réadmission et d’un plan d’action pour la réintégration des personnes renvoyées de force, les autorités n’ont toujours pas les fonds, les capacités, les ressources ni même la volonté politique pour garantir leur retour durable, a déclaré Sian Jones de l’équipe Balkans d’Amnesty International.

D’après les organisations non gouvernementales de défense des Roms et les organisations internationales oeuvrant au Kosovo, environ 50% des personnes renvoyées de force vers le Kosovo quitteront à nouveau le pays.

Selon l’agence des Nations Unies, le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR), au moins 196 membres de groupes minoritaires ont été renvoyés de force vers le Kosovo cette année. En outre, au moins 30 autres sont repartis au Kosovo soi-disant volontairement, en réalité en échange soit d’offres attrayantes comme le paiement d’une somme d’argent, soit sous la menace d’un renvoi de force s’ils ne repartaient pas « de leur propre gré ». Parmi les personnes renvoyées de force figurent non seulement des Roms, des Ashkalis et des Égyptiens, mais aussi des Serbes, des Albanais, tous risquant, de par leur statut minoritaire, d’être victimes de persécutions ou d’atteintes graves à leur intégrité physique comme l’a rappelé le HCR. Aussi le HCR considère-t-il que les groupes susmentionnés font partie des catégories de personnes éligibles pour une protection internationale continue, compte tenu d’un risque particulier de persécution ou d’atteinte grave à leur intégrité physique au Kosovo, y compris résultant d’une discrimination multiple.

En outre, seulement un petit nombre des mesures identifiées par le gouvernement kosovar dans sa Stratégie pour la réintégration des personnes rapatriées, censées garantir l’accès des personnes renvoyées aux droits élémentaires, y compris l’éducation et les soins de santé, ont été mises en œuvre par les ministères compétents. Un tel manquement empêche à l’évidence tout espoir de retour durable pour les personnes concernées. Á titre d’exemple, le taux de chômage parmi les communautés de Roms, d’Ashkalis et d’Égyptiens atteint 97% et illustre la quasi-impossibilité pour eux de décrocher un quelconque emploi.

Au niveau local également, pratiquement aucune des communes vers lesquelles retournent des Roms et des Ashkalis n’a mis en œuvre les obligations lui incombant aux termes de la Stratégie gouvernementale, pas même les aider avec une documentation minimale indispensable pour accéder aux services de base.

« Tant que les autorités kosovares seront incapables de garantir les droits humains fondamentaux des membres de la communauté Rom et des autres groupes minoritaires, ces derniers seront à nouveau confrontés à une discrimination systématique qui, selon Amnesty International, pourrait valoir persécution », a déclaré Sian Jones. « En d’autres termes, tant que le Kosovo sera incapable de telles garanties, les membres des groupes minoritaires sont en droit d’attendre de la communauté internationale qu’elle leur offre la protection dont ils ont tant besoin et ce, aussi longtemps que nécessaire ».

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