L’exécution en Afghanistan de cinq hommes reconnus coupables de viol collectif à l’issue d’une série de procès entachés d’irrégularités constitue un affront à la justice, a déclaré Amnesty International.
Cinq hommes condamnés pour vol à main armée et rapports sexuels en dehors du mariage (zina) à la suite du viol collectif de quatre femmes le 22 août dernier dans le district de Paghman, près de Kaboul, ont été exécutés mercredi 8 octobre à la prison de Pul-e-Charkhi. Ils ont été condamnés à mort en première instance le 7 septembre, sentence confirmée par une cour d’appel le 15 septembre puis par la Cour suprême le 24 septembre, et validée par le président alors en fonctions, Hamid Karzaï.
« Il s’agissait d’un crime épouvantable et l’indignation et la colère que cette affaire a suscitées sont bien sûr compréhensibles. Amnesty International continue de mener campagne contre le viol et les autres agressions sexuelles partout dans le monde, y compris en Afghanistan. Cependant, la peine de mort ne rend pas justice – elle ne fait que constituer une vengeance à court terme, a déclaré David Griffiths, directeur adjoint du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.
« La peine capitale est une forme de châtiment odieuse et ne devrait jamais être utilisée, quelles que soient les circonstances. Les nombreuses préoccupations relatives à l’équité des procès dans cette affaire rendent ces exécutions d’autant plus injustes. Il est extrêmement décevant que le nouveau président, Ashraf Ghani, n’ait rien fait pour les empêcher. »
Amnesty International engage par ailleurs le gouvernement afghan à faire en sorte que tous les viols soient interdits en droit, en principe et en pratique et que les auteurs de tels faits soient punis, ainsi qu’à œuvrer afin d’éliminer la condamnation sociale que subissent les victimes de viol – la faute incombe exclusivement aux agresseurs et eux seuls devraient être rejetés.
« Cette affaire a fait ressortir certaines graves défaillances de la justice et de la législation afghanes, que le nouveau président Ashraf Ghani a lui-même promis d’examiner. Les procès ont été marqués par les incohérences, les allégations de torture laissées sans suite et l’ingérence politique. En inculpant ces hommes de rapports sexuels en dehors du mariage, les autorités afghanes ont perpétué le traitement systématique du viol de façon erronée, a déclaré David Griffiths.
« Le président Ghani a été placé dans une position peu enviable par les actions de son prédécesseur dans cette affaire, mais il est regrettable qu’il ait manqué sa première occasion de faire respecter les droits humains et l’état de droit. Ces morts sont maintenant irréversibles, mais le président Ghani doit ordonner un moratoire immédiat sur toutes les exécutions en vue d’abolir totalement la peine de mort. »
Complément d’information
Les exécutions qui ont eu lieu mercredi 8 octobre sont les premières de l’année 2014 en Afghanistan. Durant les mandats successifs de l’ancien président Hamid Karzaï (de décembre 2001 à septembre 2014), Amnesty International a recensé au moins 51 exécutions. Actuellement, quelque 300 prisonniers sont sous le coup d’une condamnation à mort dans le pays.
Amnesty International s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, indépendamment de la nature et des circonstances du crime commis, de la situation du condamné, de sa culpabilité ou de son innocence, ou encore de la méthode utilisée pour procéder à l’exécution. La peine capitale bafoue le droit à la vie et constitue le châtiment le plus cruel, le plus inhumain et le plus dégradant qui soit.