Qu’est-ce que la discrimination et d’où vient-elle ?

Nous avons tous le droit d’être traités de manière égale, quels que soient notre apparence, notre appartenance ethnique, notre nationalité, notre classe, notre caste, notre religion, nos croyances, notre sexe, notre genre, notre langue, notre orientation sexuelle, notre identité de genre, nos caractéristiques sexuelles, notre âge, notre état de santé ou tout autre statut. Pourtant, il arrive trop souvent que des personnes soient victimes de cruauté simplement parce qu’elles appartiennent à un groupe « différent » de celui des personnes en position de privilège ou de pouvoir. 

On parle de discrimination lorsqu’une personne n’est pas en mesure de faire respecter ses droits humains ou d’autres droits légaux sur une base égalitaire, sans distinction injustifiée faite dans la politique, la loi ou le traitement.

Au cœur de toutes les formes de discrimination se trouvent les préjugés fondés sur des concepts d’identité et le besoin de s’identifier à un certain groupe. Cela peut conduire à la division, à la haine et même à la déshumanisation d’autres personnes parce qu’elles ont une identité différente. 

La discrimination peut être directe ou indirecte. La discrimination directe consiste à traiter une personne moins favorablement qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, en raison d’une caractéristique protégée par la loi. Par exemple, si une personne se voit refuser un emploi en raison de la couleur de sa peau. La discrimination indirecte est une pratique, un critère, une action ou une politique qui est neutre en apparence mais qui désavantage, en réalité, les membres d’un groupe protégé. Par exemple, si les animaux domestiques ne sont pas autorisés dans un café, cela signifie qu’une personne malvoyante avec un chien d’assistance ne peut pas y entrer non plus.

Le droit de faire respecter ses droits sans discrimination est l’un des principes les plus fondamentaux du droit international des droits de l’homme, qui figure dans pratiquement tous les grands instruments relatifs aux droits de l’homme, par exemple à l’article 2 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme :

Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamées dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation

Art. 2 DUDH

POURQUOI DISCRIMINONS-NOUS ?

Par la peur, par ignorance… 
La discrimination est généralement causée par un manque d’ouverture, des préjugés et de fausses croyances que nous pouvons avoir. Ce qui est inconnu, nouveau, inhabituel est effrayant. Cela provoque en nous une attitude de rejet, d’exclusion, voire de violence. C’est comme un instinct de protection : nous attaquons d’abord parce que nous avons peur d’être attaqué·e·s. 

Par une forme de paresse 
Une autre explication peut être trouvée dans la difficulté que l’on peut avoir à s’adapter, à faire des efforts, à abandonner ses habitudes. En effet, accueillir des personnes « différentes » implique souvent de devoir adapter l’environnement, de faire des concessions, de modifier ses habitudes. 

Par formation 
Dans le phénomène de la discrimination, il peut y avoir une attitude individuelle mais aussi une forte influence du groupe. Les individus peuvent ne pas accepter d’autres individus pour telle ou telle raison, importante pour eux. La société peut également être responsable d’actes discriminatoires (par exemple, la non-accessibilité des locaux aux personnes en fauteuil roulant).

LE RÔLE DES POLITIQUES

Dans de nombreuses régions du monde, la politique de la peur est en hausse. L’intolérance, la haine et la discrimination creusent un fossé de plus en plus profond dans les sociétés. La politique de la peur éloigne les gens les uns des autres alors que les dirigeants colportent une rhétorique toxique, accusant certains groupes de personnes d’être responsables des problèmes sociaux ou économiques. 

Certains gouvernements essaient de renforcer leur pouvoir et le statu quo en justifiant ouvertement la discrimination au nom de la moralité, de la religion ou de l’idéologie. La discrimination peut être inscrite dans le droit national, même lorsqu’elle viole le droit international – par exemple, la criminalisation de l’avortement qui prive les femmes, les jeunes filles et les personnes enceintes des services de santé dont elles ont seulement besoin. Certains groupes peuvent même être considérés par les autorités comme plus susceptibles d’être criminalisés simplement pour ce qu’ils sont, comme le fait d’être pauvre, indigène ou noir.

DIFFÉRENTES FORMES DE DISCRIMINATION

La discrimination étant elle-même fondée sur des stéréotypes et une classification des personnes, il est difficile de définir une typologie de la discrimination sans suivre ces concepts. L’aperçu qui suit ne doit donc pas être considéré comme des catégories complètes ou tranchées. Il est également important de garder à l’esprit que de nombreuses personnes sont soumises à plusieurs types de discrimination en même temps ou dans différentes situations de leur vie.

RACISME ET DISCRIMINATION ETHNIQUE

Signe d'une manifestation contre le racisme et la violence policière après le meurtre de George Floyd par des policiers de Minneapolis le 25 mai 2020. La vidéo de cet événement brutal a choqué la conscience mondiale et a attiré l'attention sur les nombreuses autres victimes du racisme systémique et anti-Noir du système juridique pénal américain actuel. George Floyd était l'une des plus de 1 000 vies prises chaque année aux mains des forces de l'ordre aux États-Unis.

Le racisme touche pratiquement tous les pays du monde. Il prive systématiquement les gens de leurs droits fondamentaux en raison de leur apparence « raciale », de leur origine ethnique ou de leur ascendance. Le racisme non maîtrisé peut alimenter des atrocités à grande échelle, comme le génocide de 1994 au Rwanda et, plus récemment, l’apartheid et le nettoyage ethnique du peuple Rohingya au Myanmar.

Le terme « race » est problématique – surtout en allemand – car il est associé à un concept biologiste scientifiquement indéfendable et n’est pas compris comme une construction sociale. Déterminer des « races humaines » biologiquement différentes sur la base de caractéristiques externes ne repose sur aucune base scientifique. Ce terme est le symbole d’une longue histoire d’extermination et de violence racistes. L’UNESCO a noté dès 1950 qu’il s’agissait d’une construction sociale qui a causé des souffrances incommensurables.

Exemple : les autorités israéliennes doivent mettre fin aux homicides illégaux, aux blessures volontaires, aux arrestations arbitraires, à la torture et aux autres formes de maltraitances, aux persécutions et aux sanctions collectives contre les Palestiniens, dont de nombreux enfants, qui se sont multipliés depuis l’entrée en fonction du Premier ministre israélien Naftali Bennett en juin 2021. (Lire la déclaration complète d’Amnesty ici) 

Femme palestinienne devant les ruines de sa maison. Depuis la création de l'État d'Israël en 1948, des communautés palestiniennes entières ont été déplacées et des centaines de milliers de maisons de Palestiniens ont été démolies. Plus de 6 millions de Palestiniens restent des réfugiés, dont la grande majorité vit dans des camps de réfugiés, y compris en dehors d'Israël/des Territoires palestiniens occupés (TPO). Plus de 100 000 Palestiniens dans les TPO et 68 000 autres en Israël risquent de perdre leur maison de manière imminente, souvent pour la deuxième ou troisième fois.

Dans l’actualité : le plus haut tribunal administratif de France a décidé en juillet 2022 de confirmer une décision d’un tribunal de première instance qui interdisait l’utilisation de « burkinis » intégraux dans les piscines publiques de Grenoble, après que la ville eut proposé de permettre aux femmes de porter ce qu’elles veulent pour se baigner dans ses piscines publiques. (Lire l’article complet ici)

Ci-contre, des femmes en foulard discutent avec une femme en maillot de bain à Anvers lors de la beach party de protestation contre l’interdiction du Burkini en France.

DISCRIMINATION CONTRE NON-NATIONAUX (XÉNOPHOBIE)

Des militants d'Amnesty International lors de la manifestation « Unteilbar » 2021 à Berlin, organisée par une large alliance de la société civile.

Les attitudes, préjugés et comportements qui rejettent, excluent et souvent condamnent des personnes en raison de leur statut de non-nationaux sont appelés xénophobie. Cela inclut, dans un sens plus large, toutes les personnes qui sont perçues comme des étrangers à la communauté, à la société ou à l’identité nationale. Ce type de discrimination est souvent fondé sur le racisme ou des notions de supériorité et est souvent alimenté par des politiciens à la recherche de boucs émissaires pour les problèmes sociaux ou économiques d’un pays.

Exemple : en Europe, les Roms sont environ 10 à 12 millions et représentent la plus grande minorité ethnique. En Roumanie, Bulgarie, Slovaquie, Hongrie et dans les Balkans, ils représentent jusqu’à 10% de la population. Dans ces pays, les populations roms ont adopté un mode de vie sédentaire, mais elles sont souvent marginalisées (métiers, habitats, culture et langue spécifiques). Ils forment des communautés bien identifiées, victimes de forts préjugés.

DISCRIMINATION CONTRE DES GROUPES RELIGIEUX

Des militants lors d'une remise de pétition à Paris demandant aux autorités chinoises de libérer les détenus de la région autonome ouïgoure du Xinjiang, en Chine. Des centaines de milliers d'hommes et de femmes appartenant à la minorité musulmane sont soumis à un emprisonnement massif et à la torture dans cette région. Des millions de musulmans sont soumis à une surveillance de masse systématisée par le gouvernement chinois et les groupes ethniques musulmans sont contraints d'abandonner leurs traditions religieuses, leurs pratiques culturelles et leurs langues locales.

La discrimination peut être dirigée contre toute religion ou secte, ainsi que contre les personnes ne partageant pas une croyance spécifique ou les athées. La discrimination à l’encontre des membres de groupes religieux et de croyances ou de personnes perçues comme y appartenant est étroitement liée à d’autres types de discrimination, en particulier à la discrimination fondée sur l’ethnicité (perçue) et la xénophobie. La persécution systématique des Rohingya, une minorité principalement musulmane, au Myanmar, en est un exemple.

Les membres des minorités religieuses sont particulièrement persécutés. Au Yémen, par exemple, parmi les personnes soumises à des procès inéquitables sur la base d’accusations forgées de toutes pièces et de procédures manifestement inéquitables figurent de nombreuses personnes de confession bahaïe.

L’antisémitisme se montre à nouveau plus décomplexé et violent, par exemple en Allemagne où une synagogue a été attaquée le 9 octobre 2019 dans la ville de Halle. Tant dans les médias numériques que dans la rue, les idéologies conspirationnistes et la violence antisémite se manifestent ouvertement.

L’islamophobie, c’est-à-dire la discrimination à l’encontre des musulmans et de ceux qui sont perçus comme tels, est une préoccupation de longue date en matière de droits de l’homme. Au cours des deux dernières décennies en particulier, les activités et affiliations religieuses, culturelles et politiques légales des musulmans ont été interprétées comme suffisamment « dangereuses » pour justifier d’importantes restrictions des droits individuels.

Exemple : depuis 2013, les autorités égyptiennes n’ont pas réussi à protéger les chrétiens coptes des attaques sectaires répétées contre leurs communautés, mais ont également échoué à traduire en justice les responsables de ces violences. Selon l’Initiative égyptienne pour les droits personnels (EIPR), un groupe égyptien indépendant de défense des droits humains, moins de 40 % des demandes de construction ou de réparation d’églises ont été approuvées sous conditions depuis l’entrée en vigueur de la loi, tandis que seulement 20 % des demandeurs ont reçu une approbation finale. L’EIPR a documenté au moins 36 cas de violence contre les communautés chrétiennes coptes entre 2016 et 2019. De nombreux incidents de violence sont déclenchés par des désaccords sur la construction ou la rénovation de lieux de culte chrétiens.

DISCRIMINATION CONTRE LES PERSONNES LGBTIQ+ 

Des militants d'Amnesty lors du « Pride March » 2022 à Esch-sur-Alzette. Les « Pride March » sont organisées dans le monde entier pour commémorer une attaque de police dans un bar LGBTIQ+, le Stonewall Inn, sur Christopher Street à New York, le 28 juin 1969. Elles sont un moyen de montrer les demandes d'acceptation et d'égalité juridique de la communauté LGBTIQ+, ainsi qu'un moyen pour les alliés de montrer leur soutien et leur solidarité. Les festivals de la fierté sont interdits dans plusieurs pays du monde, notamment en Russie, en Arabie saoudite, en Ouganda et en Turquie.

Partout dans le monde, des personnes sont victimes de discrimination en raison de la personne qu’elles aiment, de leur attirance et de leur identité. Les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres, les intersexes et les queers (LGBTIQ+) risquent d’être traités injustement dans tous les domaines de leur vie, que ce soit dans l’éducation, l’emploi, le logement ou l’accès aux soins de santé, et ils peuvent être victimes de harcèlement et de violence. Dans de trop nombreux cas, les personnes LGBTIQ+ sont harcelées dans la rue, battues et parfois tuées, simplement à cause de ce qu’elles sont. Une vague de violence contre les personnes trans a coûté la vie à au moins 369 personnes entre octobre 2017 et septembre 2018. De nombreuses personnes intersexuées dans le monde sont contraintes de subir des opérations chirurgicales dangereuses, invasives et totalement inutiles, qui peuvent entraîner des effets secondaires physiques et psychologiques à vie.

Homophobie : la peur irrationnelle ou la haine des homosexuels, de l’homosexualité ou de tout comportement ou croyance qui ne se conforme pas aux stéréotypes rigides des rôles sexuels.

Exemple : Selon les données de Human Rights Watch, au moins 69 pays disposent de lois nationales criminalisant les relations homosexuelles entre adultes consentants.  En outre, au moins neuf pays ont des lois nationales qui criminalisent des formes d’expression de genre qui visent les personnes transgenres et non-conformes au genre. Dans 71 pays, l’homosexualité est illégale. Dans plusieurs pays, l’homosexualité est même punie de mort. La vie quotidienne peut également être faite de menaces et d’humiliations en paroles ou en actes, pouvant aller jusqu’à l’agression.

Dans l’actualité du 22.07.2022 : les autorités libanaises ont illégalement interdit les rassemblements pacifiques de personnes LGBTIQ+. Cette interdiction viole les droits constitutionnels des personnes LGBTIQ+ à l’égalité, à la liberté d’expression et à la liberté de réunion, ainsi que les obligations du Liban en vertu du droit international, et intervient dans un contexte de crise économique et de dégradation du climat pour les droits des personnes LGBTIQ+ dans le pays.

LGBTIQ+ Glossaire 

Il existe de nombreux termes utilisés pour comprendre le sexe, le genre, la sexualité et l’identité ; nous n’en présentons que quelques-uns ici. Vous trouverez d’autres termes ici.

  • Asexuel·le – Personne qui n’est pas sexuellement attirée par quelqu’un ou qui n’a pas d’orientation sexuelle.
  • Bisexuel·le – Personne attirée émotionnellement, physiquement et/ou sexuellement par les hommes et les femmes. Cette attirance ne doit pas nécessairement être répartie de manière égale entre les sexes et il peut y avoir une préférence pour un sexe plutôt qu’un autre.
  • Cisgenre – décrit une personne qui se sent à l’aise avec les attentes en matière d’identité et d’expression de genre qui lui sont attribuées en fonction de son sexe physique.
  • Intersexe – Une personne dont le médecin a du mal à classer le sexe dans la catégorie homme ou femme.
  • Pansexuel·le – Une personne qui est sexuellement attirée par toutes ou plusieurs expressions de genre.
  • Transgenre – Une personne qui vit comme un membre d’un genre autre que celui prévu sur la base du sexe anatomique. L’orientation sexuelle varie et ne dépend pas de l’identité de genre.

DISCRIMINATION DU GENRE

Des activistes défilent dans la ville de Luxembourg pour marquer la Journée internationale de la femme. Depuis 1975, le 8 mars est un rendez-vous pour les féministes du monde entier. Instituée par les Nations unies, cette journée est traditionnellement l'occasion de célébrer les réalisations des femmes tout en soulignant les graves inégalités.

Dans de nombreux pays, dans toutes les régions du monde, il existe des lois, des politiques, des coutumes et des croyances qui privent les femmes et les filles de leurs droits.

Dans le combat permanent pour la justice, des centaines de milliers de femmes et de filles descendent dans la rue pour revendiquer leurs droits fondamentaux et exiger l’égalité des sexes. Aux États-Unis, en Europe et au Japon, des femmes ont protesté contre la misogynie et les abus dans le cadre des marches #MeToo. En Argentine, en Irlande et en Pologne, les femmes ont manifesté pour demander l’arrêt des lois oppressives sur l’avortement. En Arabie Saoudite, elles ont demandé la fin de l’interdiction de conduire, et en Iran, elles ont exigé la fin du hijab (voile) forcé.

Dans le monde, 40 % des femmes en âge de procréer vivent dans des pays où l’avortement reste fortement limité ou inaccessible dans la pratique, même lorsqu’il est autorisé par la loi, et quelque 225 millions de femmes n’ont pas accès à une contraception moderne.

Exemple : les menstruations et les tabous qui les entourent

Samikshya Koirala, du Népal, a eu ses règles pour la première fois à l’âge de 11 ans. Non seulement elle a été bannie de la maison pendant cinq jours, mais il lui a également été interdit de toucher les membres masculins de sa famille pendant 11 jours et d’entrer dans la cuisine pendant 19 jours.

Dans l’actualité : plus de la moitié des femmes amérindiennes et autochtones de l’Alaska ont subi des violences sexuelles au cours de leur vie ; une sur trois a été victime d’un viol. Depuis le premier rapport d’Amnesty International sur cette question en 2007, les taux de violence à l’égard des femmes autochtones n’ont pas sensiblement évolué, et le gouvernement américain continue de ne pas prévenir et de ne pas réagir de manière adéquate à ces violences. (Article complet ici)

DISCRIMINATION BASÉE SUR LA CASTE

Des travailleurs du parti All India Congress crient des slogans lors d'une manifestation contre le gouvernement central dirigé par le Bharatiya Janata Party (BJP) sur la question des atrocités commises contre les castes répertoriées et les Dalits en Inde, le 12 août 2021 à New Delhi, en Inde.

La discrimination fondée sur le travail et l’ascendance (également appelée discrimination de caste) est très répandue en Asie et en Afrique et touche plus de 260 millions de personnes, y compris celles de la diaspora. En raison de leur identité de naissance, les personnes issues de ces communautés sont exclues socialement, privées économiquement et soumises à des violences physiques et psychologiques. La discrimination fondée sur le travail et l’ascendance est profondément ancrée dans la société, elle se manifeste dans la vie quotidienne, dans les perceptions individuelles de la culture et des coutumes, dans les structures sociales et économiques, dans l’éducation et l’emploi, et dans l’accès aux services, aux opportunités, aux ressources et au marché.

Exemple : la discrimination fondée sur les castes en Inde   

La discrimination et la violence à l’égard des Dalits et des Adivasis par des acteurs étatiques et non étatiques sont très répandues et restent souvent impunies. Selon les statistiques officielles, plus de 50 000 crimes contre des membres des castes répertoriées et 8 272 crimes contre des tribus répertoriées ont été signalés en 2020. Les femmes dalits et adivasis étaient confrontées à des violences sexuelles de la part d’hommes issus des classes dominantes. Nombre d’entre elles étaient victimes de discrimination dans l’accès aux services publics.

La loi sur les castes et les tribus répertoriées (prévention des atrocités) – qui vise à poursuivre les crimes contre les Dalits et les Adivasis – n’est souvent pas utilisée par la police lors de l’enregistrement des infractions, ce qui entraîne une sous-déclaration de ces crimes. Les taux de condamnation au titre de cette loi sont également faibles. 

Un recensement officiel a indiqué en juillet 2015 que plus de 180 000 ménages pratiquaient le « balayage manuel » – la pratique du nettoyage des déchets humains effectuée principalement par les Dalits, malgré les lois interdisant cette pratique. Les défenseur·e·s des droits humains ont déclaré que le chiffre du recensement est une sous-estimation.

DISCRIMINATION FONDÉE SUR LE HANDICAP (ABLÉISME)

Gulzar Duishenova a perdu sa mobilité après un accident de voiture provoqué par des conducteurs ivres en 2002. En 2006, lorsqu'elle a rencontré des personnes ayant des problèmes similaires, elle est devenue un membre actif et très engagé de la société civile au Kirghizstan, faisant une campagne pour l'égalité d'accès aux services de santé, à l'emploi et aux infrastructures pour les femmes handicapées. Elle fait preuve d'un grand courage en s'exprimant sur des questions qui ne sont pas confortables pour la plupart des gens, y compris pour sa famille, comme le droit à la santé et à l'indépendance des femmes handicapées ou le droit à des produits d'hygiène accessibles.

Selon l’Organisation mondiale de la santé, plus d’un milliard de personnes, soit environ 15 % de la population mondiale, souffrent d’un handicap. Ce chiffre est en augmentation en raison de la hausse des maladies chroniques et du vieillissement de la population. Pourtant, partout dans le monde, les personnes handicapées doivent lutter contre la stigmatisation, l’ostracisme et le fait d’être traitées comme des objets de pitié ou de peur.

Les pays en développement abritent environ 80 % des personnes handicapées, selon le programme de développement des Nations Unies. L’écrasante majorité des personnes handicapées – 82 % – vit en dessous du seuil de pauvreté. Les femmes handicapées sont deux à trois fois plus susceptibles de subir des violences physiques et sexuelles que les femmes non handicapées.

Exemple : pour un rapport publié en 2015, les chercheurs d’Amnesty International se sont entretenus avec des personnes handicapées en Somalie, qui subissent des abus, sont souvent considérées comme un fardeau ou comme des cibles plus faciles pour les agresseurs. Les femmes et les filles handicapées ont déclaré qu’elles étaient contraintes de se marier avec des hommes plus âgés et/ou violents dans le but de se débarrasser du fardeau que représente le fait d’avoir des enfants handicapés.

DISCRIMINATION BASÉE SUR L’ÂGE (AGÉISME)

Abul Hossain, âgé d'environ 85 ans, est assis dans son abri du camp #1 West (camp de Kutupalong), au Bangladesh, le 19 février 2019. Il dit avoir du mal à se frayer un chemin sur le terrain vallonné des camps, ce qui lui rend difficile l'accès aux latrines et aux installations sanitaires. « La distance [jusqu'aux latrines] n'est pas si éloignée, mais le problème est que le terrain n'est pas plat. Je devrais monter et descendre les collines ».

Les personnes âgées sont souvent victimes de stéréotypes, de préjugés, de discrimination et d’abus, et la pandémie de COVID-19 n’a fait qu’exacerber ce phénomène. 

En Italie, des milliers de résidents de maisons de retraite ont perdu la vie depuis le début de la pandémie. Les recherches menées par Amnesty International ont montré les principales défaillances liées à la gestion de la pandémie dans les maisons de retraite, qui ont contribué à la propagation de l’infection au COVID-19. Des résultats de recherche similaires ont été trouvés pour la Belgique, l’Espagne et le Royaume-Uni.

Exemple : des dizaines de milliers de femmes et d’hommes âgés issus de minorités ethniques du Myanmar, qui ont été victimes d’atrocités militaires et ont été contraints de fuir leur foyer, sont abandonnés par un système humanitaire qui ne répond souvent pas de manière adéquate à leurs droits et à leurs besoins. Dans les camps de réfugiés du Bangladesh, beaucoup de femmes et d’hommes rohingyas âgés ne peuvent pas accéder régulièrement aux services les plus élémentaires, notamment l’assainissement, les soins de santé, l’eau et la nourriture. L’encombrement des camps et le terrain en collines rendent l’environnement difficile, en particulier pour les personnes âgées à mobilité réduite.

DISCRIMINATION BASÉE SUR L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Avec sa campagne « Ban the Scan », Amnesty International lutte contre l'utilisation des systèmes de reconnaissance faciale, une forme de surveillance de masse qui amplifie les pratiques policières racistes et menace le droit de manifester. Les communautés noires et minoritaires risquent d'être mal identifiées et arrêtées à tort – dans certains cas, la reconnaissance faciale est inexacte à 95 %. Même lorsqu'elle « fonctionne », elle peut aggraver les pratiques policières discriminatoires et empêcher l'exercice libre et sûr des rassemblements pacifiques, en agissant comme un outil de surveillance de masse.

L’utilisation de modèles mathématiques suggère une illusion d’objectivité, ce qui rend difficile la mise en question de ces décisions. En effet, les calculs se produisent dans une « boîte noire » et les personnes extérieures ne savent pas pourquoi l’intelligence artificielle est parvenue à tel ou tel résultat. Or, sans cette transparence, il est difficile de remettre en cause un tel système.

Si l’intelligence artificielle a un effet discriminatoire, on parle d’un biais des algorithmes. Ce biais peut survenir pour de nombreuses raisons. Les logiciels d’auto-apprentissage sont toujours basés sur des modèles mathématiques censés représenter la réalité dans une certaine mesure. La vision du monde et la perspective des développeurs jouent ici un rôle primordial.

Cela peut avoir des conséquences très graves : une enquête menée par ProPublica en 2016 sur les peines de libération conditionnelle prononcées par l’État américain de Floride a révélé que les détenus noirs se voyaient régulièrement recommander des peines de libération conditionnelle plus longues que les détenus blancs ayant commis des crimes plus graves, par des algorithmes qui travaillaient avec des données présentant un biais historique. Les juges qui consultent les scores automatisés de risque de récidive infligent dans de nombreux cas une peine plus lourde à ceux dont le score de risque est le plus élevé – même si la recommandation est erronée.

Exemple : l’intelligence artificielle et la protection de la vie privée en Chine

Un système de surveillance composé de plus de 170 millions de caméras et de 400 millions d’autres caméras, dont beaucoup sont équipées de logiciels d’intelligence artificielle, permet aux autorités chinoises d’identifier, de suivre et finalement d’appréhender des individus en temps réel. Il est possible de faire correspondre chaque visage capturé avec des documents d’identification enregistrés, de créer des schémas de déplacement complets pour la semaine écoulée et de déterminer qui a rencontré qui, quand, où, dans quel cadre, à quelle fréquence et pendant combien de temps. Les algorithmes et les logiciels de reconnaissance faciale créent ainsi un système de surveillance permanente qui n’aurait jamais été possible sans cette technologie.

Dans ce système, il n’y a plus de droit à la vie privée dans la sphère publique – les citoyens sont incapables d’échapper à la surveillance quasi généralisée ou de s’y opposer.

QUE FAIRE CONTRE LA DISCRIMINATION ?

Les lois et les mentalités doivent changer pour que chacun ait un accès égal aux droits.

Les gouvernements doivent :

  • Se débarrasser des lois discriminatoires et libérer tous ceux qui sont en prison à cause d’elles.
  • Protéger toute personne – quelle qu’elle soit – contre la discrimination et la violence.
  • Introduire des lois et des politiques qui favorisent l’inclusion et la diversité dans tous les aspects de la société.
  • Prendre des mesures pour s’attaquer aux causes profondes de la discrimination, notamment en combattant les stéréotypes et les attitudes qui la favorisent.

Tout le monde doit : 

  • S’éduquer à la lutte contre la discrimination.
  • Reconnaître que la discrimination est illégale.
  • Dénoncer la discrimination et le racisme pour susciter une prise de conscience.

L’éducation aux droits humains est nécessaire pour déconstruire les stéréotypes, combattre les préjugés et être capable d’identifier les discriminations, et ce, à travers l’échange verbal, le débat, l’utilisation des différentes connaissances et de la recherche scientifique. La demande d’adopter une attitude responsable basée sur l’esprit critique conduit également à un questionnement personnel. De nombreux outils vous permettront de travailler sur ce thème avec des publics de tous âges.

Cette démarche doit être accompagnée d’un rappel des fondements des droits humains et des citoyen·ne·s, du droit et des principes démocratiques.

Il sera alors possible de s’inscrire dans un projet individuel (participer à une action de lutte contre telle ou telle discrimination) ou dans un projet collectif (adhérer à une association qui lutte contre les discriminations)

5 façons concrètes de dénoncer le racisme et la haine :

1. Dialoguez. La discrimination peut être déguisée en blague ou en opinion politique. L’ouverture d’esprit et l’écoute des personnes qui ont été confrontées au racisme peuvent favoriser la compréhension et le soutien.

2. S´ouvrir à des conversations gênantes. À l’heure où les discours haineux et l’islamophobie s’insinuent dans le grand public, il est essentiel de s’exprimer, lorsque l’on se sent en sécurité. Commencez à exprimer ce que les mots de quelqu’un vous font ressentir. 

3. Parlez de personnes, pas de chiffres. Si quelqu’un se plaint de l’immigration, demandez-lui ce qu’il ferait, par exemple pour protéger sa famille dans une zone de guerre. 

4. Ménagez votre langage. Les mots peuvent masquer l’humanité des gens. Par exemple, dire « migrant·e·s », c’est ignorer la situation individuelle de millions de personnes et alimenter les stéréotypes. Parlez plutôt de personnes qui ont leur propre histoire à raconter. 

5. Dites ce que vous défendez. Par exemple : à Amnesty, nous ne sommes pas seulement contre le racisme, nous sommes pour un monde où nous pouvons tous vivre librement et sans crainte. Et c’est à nous tous qu’il incombe de faire de cet objectif une réalité.

SOURCES POUR L’ÉDUCATION AUX DROITS HUMAINS ET LECTURES COMPLÉMENTAIRES

Ressources en anglais

Ressources en francais

Ressources en allemand

Video „Diskriminierung in drei Minuten erklärt“: https://www.amnesty.ch/de/menschenrechtsbildung/schule/material/diskriminierung-in-drei-minuten-erklaert

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