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Russie/Ukraine. La pire catastrophe pour les droits humains dans l’histoire européenne récente

Modifié le 8 mars 2022.

Alors que la Russie intensifie son offensive militaire contre l’Ukraine et s’est emparée de la centrale nucléaire de Zaporijiaen, Amnesty International Luxembourg réitère ses appels à dénoncer l’acte d’agression de la Russie, à tenir responsable tous les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité et à arrêter immédiatement la répression des libertés en Russie. L’organisation appelle également les États européens à accueillir sans discrimination toute personne fuyant le conflit.

Un acte d’agression par la Russie et une catastrophe humanitaire

Olivier Pirot, directeur d’Amnesty International Luxembourg, rappelle que « l’invasion de l’Ukraine est un acte clair d’agression visant à renverser un gouvernement légalement élu. C’est très clairement un crime au regard du droit international, et une violation éhontée de la Charte des Nations Unies qui interdit le recours à la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État ». La Russie ne peut en aucune manière déroger à cette interdiction : en l’absence de tout acte d’agression de l’Ukraine, elle ne peut en effet se prévaloir du principe de légitime défense, et n’a par ailleurs en aucun cas été autorisée par le Conseil de sécurité de l’ONU de faire usage de la force.

« Rien ne justifie un tel acte de la part de la Russie, un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU censé œuvrer pour la paix, la sécurité et la justice internationales » souligne Olivier Pirot et d’ajouter que « les responsables de ce crime et de tous les nombreux crimes qui ont et seront perpétrés lors de cette invasion de l’Ukraine devront répondre de leurs actes ». La Cour Pénale Internationale (CPI), saisie par 39 États membres, a décidé d’ouvrir une enquête sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité qui pourraient être commis en Ukraine. Amnesty International appelle tous les États parties à la CPI et la communauté internationale dans son ensemble à coopérer à l’enquête de la CPI.

« La collecte et la préservation des preuves sont cruciales pour que justice puisse être faite », rappelle Olivier Pirot. C’est pourquoi, depuis le début de l’invasion russe le 24 février, Amnesty International documente l’escalade des violations du droit humanitaire et des droits humains, notamment la mort de civils résultant d’attaques aveugles contre des zones et des infrastructures civiles. Nos équipes de recherches ont notamment documenté le fait que des armes dites conventionnelles, en l’occurrence des missiles, ont déjà frappé des civils. Les frappes dans des zones résidentielles et sur des établissements protégés tels que les hôpitaux et les écoles, l’utilisation d’armes aveugles telles que les missiles balistiques et l’utilisation d’armes interdites telles que les bombes à sous-munitions peuvent toutes être qualifiées de crimes de guerre.

Pour Olivier Pirot, le constat que pose Amnesty International est sans équivoque : « La crise est massive et le conflit en Ukraine sera sans doute la pire catastrophe pour les droits humains, le droit humanitaire et en termes de déplacement de population dans l’histoire européenne récente. C’est toute l’architecture de sécurité mondiale que la Russie remet en question et fragilise encore plus, et nous devons nous préparer à faire face à des conséquences à long terme ».

Amnesty International rappelle qu’il est impératif que les membres du Conseil de sécurité et les membres de l’ONU condamnent fermement les crimes d’agression commis par la Russie et œuvrent ensemble à fournir secours et assistance aux citoyens ukrainiens, et à tous les civils en Ukraine y compris ceux qui fuient le conflit.

Amnesty International réitère son appel à un respect strict du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains : les vies, les habitations et les infrastructures civiles doivent être protégées ; les attaques aveugles et l’utilisation d’armes interdites telles que les armes à sous-munitions ne doivent pas avoir lieu ; l’accès des organisations humanitaires aux zones de conflit doit être autorisé et facilité pour porter assistance à la population civile.

UE : Une protection temporaire est nécessaire pour toutes les personnes fuyant l’Ukraine.

« Si nous saluons l’activation par le Conseil de l’Union européenne, et pour la première fois, de la directive sur la protection temporaire, nous regrettons que cette aide soit limitée principalement aux Ukrainiens fuyant le conflit » déclare Olivier Pirot. « Toute personne fuyant un conflit doit bénéficier d’une protection et d’une aide pour s’établir. En limitant cette aide, le Conseil montre les limites de la solidarité européenne. »

La décision d’aujourd’hui signifie que les Ukrainiens en quête de sécurité dans l’UE obtiendront rapidement des permis de séjour, pourront travailler et bénéficieront d’un logement approprié, d’une aide sociale, d’une assistance médicale et d’une éducation. Il appartient maintenant aux États membres de décider s’ils vont étendre ces mesures à d’autres personnes fuyant l’Ukraine. « Amnesty International enjoint les États membres à traiter de la même manière toutes les personnes qui fuient ce conflit » précise Olivier Pirot

La décision du Conseil nous rappelle que l’Europe dispose depuis longtemps des outils nécessaires pour protéger les personnes fuyant l’Ukraine et aider les nouveaux arrivants, et que l’approche habituelle de la « forteresse Europe » est un choix motivé politiquement qui démontre une approche tenant du deux poids deux mesures.

Amnesty International a demandé à plusieurs reprises l’activation de la protection temporaire, tout récemment dans le cadre de la réponse de l’UE aux crises en Afghanistan et en Ukraine.

En Russie, un durcissement de la censure des médias et de la répression contre les manifestants antiguerre.

Face à une opinion publique de plus en plus hostile à l’agression et aux milliers de manifestants qui descendent dans les rues à travers la Russie, les autorités russes continuent de durcir la répression : censure sévère des médias, menaces de blocage de sites internet, journalistes muselés, arrestations de manifestants…

Un projet de loi prévoyant jusqu’à quinze ans de prison pour toute publication de fausse information concernant l’armée doit être maintenant examiné par le Parlement russe.

Olivier Pirot rappelle que « la répression des voix critiques et le recul net de la liberté d’expression dans la Russie de Vladimir Poutine se sont malheureusement accentués depuis plusieurs année » et ajoute « la manière dont les autorités russes piétinent les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique en Russie est inacceptable. Cette répression brutale des autorités contre ceux qui expriment leur dissidence concernant l’agression doit cesser maintenant ».

« Le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information est particulièrement vital en temps de crise et de conflit armé. Nous avons la chance de pouvoir jouir de ce droit au Luxembourg et Amnesty soutient la manifestation contre l’invasion de l’Ukraine qui se tiendra ce samedi à 15 h sur la Place Clairefontaine à Luxembourg-Ville » déclare Olivier Pirot.

Appel aux dons

Nous avons besoin de moyens pour financer notre travail. Nos expert·e·s sont mobilisé·e·s sur le terrain pour collecter des preuves de violations du droit humanitaire et des droits humains, nous nous efforçons d’assurer la sécurité des défenseur·e·s des droits humains, nous surveillons la situation aux frontières pour soutenir les personnes fuyant le conflit et s’assurer que les droits de tous et toutes sont respectés sans discrimination, et nous faisons pression sur les gouvernements afin qu’ils prennent des mesures pour protéger toutes les personnes et leurs droits. Les dons peuvent être effectués sur notre site https://soutenir.amnesty.lu/ ou par virement sur notre compte bancaire POST LU08 1111 0000 3333 0000

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