Samira Sabou, journaliste et présidente de l’association des blogueurs du Niger, a été libérée de la prison de Niamey le 28 juillet, après qu’un juge a classé sans suites la procédure engagée contre elle pour diffamation. Elle était détenue arbitrairement depuis 48 jours dans l’attente de son procès, à la suite d’une plainte pour diffamation déposée contre elle par le fils du président en raison d’un commentaire d’un utilisateur de Facebook citant le nom de ce dernier sous une publication de Samira Sabou sur le réseau social. Cette publication du 26 mai portait sur des allégations de corruption lors d’achats de matériel militaire.
Samira Sabou a été arrêtée le 10 juin après qu’une plainte a été déposée par Sani Mahamadou Issoufou, fils du président du Niger Mahamadou Issoufou et directeur adjoint de son cabinet. Le 26 mai, elle avait évoqué sur son profil Facebook le détournement de fonds et la surfacturation de contrats révélés par un audit du ministère de la Défense du Niger. Bien qu’elle n’ait jamais nommé personne dans sa publication, elle a été inculpée de « diffamation par un moyen de communication électronique », à la fois pour sa publication et pour un commentaire laissé par un utilisateur de Facebook, qui désignait Sani Mahamadou Issoufou comme l’un des coupables. Elle a ensuite été placée en détention provisoire et sa demande de libération sous caution a été rejetée. Son procès a débuté le 14 juillet. Le parquet a requis à son encontre une peine d’un mois et une semaine d’emprisonnement ainsi que le paiement d’1 million de francs CFA (environ 1 500 euros) de frais de justice. Deux semaines plus tard, l’affaire a été classée sans suites par le tribunal, qui a ordonné sa libération. Le plaignant a fait appel de cette décision.
La détention de Samira Sabou a généré une large attention médiatique portée sur la situation des défenseur·e·s des droits humains et des journalistes au Niger, ainsi que sur l’utilisation abusive de la Loi contre la cybercriminalité afin de faire taire les voix dissidentes. Son cas a suscité une grande mobilisation. En l’espace de deux semaines, plus de 5 000 personnes ont signé une pétition et plus de 2 000 courriels ont été envoyés au président du Niger pour demander qu’elle soit libérée.
Après sa libération, Samira Sabou a remercié toutes les organisations qui y ont contribué, notamment Amnesty International et ses membres qui sont passés à l’action : « Je n’oublie pas Amnesty International, particulièrement l’équipe de Dakar, dont les interventions répétées […] ont relevé dès les premières minutes les incohérences relatives à mon arrestation. […] J’ai particulièrement été touchée par la solidarité et les soutiens qui m’ont été manifestés par mes consœurs et mes confrères aux quatre coins du globe. » Elle a en outre dénoncé l’utilisation abusive de la Loi contre la cybercriminalité pour harceler des membres de la société civile et des défenseurs des droits humains : « Je continuerai à lutter en faveur de la justice au Niger en contestant devant les tribunaux la constitutionnalité de cette loi, avec tous les hommes et femmes libres et justes. »