Les « Intellexa Leaks », ou fuites de l’entreprise Intellexa, une nouvelle enquête menée conjointement par Inside Story, Haaretz et WAV Research Collective, et s’appuyant sur l’analyse technique apportée par Amnesty International, exposent le fonctionnement interne d’Intellexa, tristement célèbre pour la commercialisation du logiciel espion Predator, extrêmement intrusif et lié à des violations des droits humains dans plusieurs pays.
En réaction à cette enquête publiée le 4 décembre 2025, Jurre van Bergen, expert en technologies au sein du Security Lab d’Amnesty International, a déclaré :
« Cette enquête offre l’un des aperçus les plus clairs et les plus accablants à ce jour du fonctionnement interne et des technologies d’Intellexa.
« Le fait qu’Intellexa semble avoir conservé, au moins dans certains cas, la capacité d’accéder à distance aux journaux d’activité de ses clients utilisant Predator – permettant ainsi à son personnel de consulter les informations liées aux opérations de surveillance et aux personnes ciblées – soulève des interrogations quant à ses processus de diligence requise en matière de droits humains. Si l’on découvre qu’une société de logiciels espions mercenaires est impliquée directement dans le fonctionnement de son produit, elle pourrait alors, au regard des normes relatives aux droits humains, être tenue responsable en cas d’utilisation abusive et en cas de violations des droits humains causées par l’utilisation de ce logiciel espion.
« En outre, le logiciel espion Predator a été impliqué dans des attaques de surveillance en 2021, notamment contre le journaliste grec Thanasis Koukakis, d’après les recherches en criminalistique numérique menées par Citizen Lab. Les informations contenues dans les fichiers divulgués viennent s’ajouter aux preuves reliant les produits d’Intellexa à des violations des droits humains, notamment les droits à la vie privée et à la liberté d’expression.
« Ces révélations surviennent alors que de nouveaux cas d’utilisation malveillante de Predator sont dévoilés, démontrant que le produit d’Intellexa continue d’être utilisé pour surveiller illégalement des militant·e·s, des journalistes et des défenseur·e·s des droits humains à travers le monde. Le Security Lab d’Amnesty International a découvert une attaque contre un avocat spécialiste des droits humains de la province pakistanaise du Baloutchistan via WhatsApp durant l’été 2025, prouvant ainsi que le logiciel espion Predator est activement utilisé au Pakistan, en violation flagrante du droit à la vie privée et de la liberté d’expression.
« Plus inquiétant encore, la société a récemment développé un nouveau logiciel espion baptisé Aladdin, capable d’infecter les téléphones portables via des publicités en ligne. »
Complément d’information
Les « Intellexa Leaks » sont le fruit d’une enquête de plusieurs mois s’appuyant sur un ensemble de documents et de supports hautement sensibles ayant fuité de l’entreprise, notamment des documents internes, des supports marketing et commerciaux, ainsi que des vidéos de formation. Une analyse approfondie de ces éléments, ainsi que les détails de la réponse reçue par Haaretz de la part du fondateur d’Intellexa en réponse à une demande de commentaires de l’entreprise, sont disponibles dans la synthèse technique du Security Lab d’Amnesty International, intitulée To Catch a Predator: Leak exposes the internal operations of Intellexa’s spyware.
Amnesty International a déjà documenté les capacités techniques d’Intellexa et de nombreux cas d’atteintes aux droits humains en lien avec ses logiciels espions dans le cadre du rapport sur les « Predator Files » publié en 2023. Elle publiera prochainement dans une série de rapports les enquêtes en cours sur la campagne d’attaques au Pakistan et d’autres cas de violations.