AI-Luxembourg News Printemps/été 2020

Le bulletin d’information d’Amnesty International Luxembourg

Le 26 février 1970, un groupe d’ami·e·s et de connaissances de différentes nationalités fondaient Amnesty International Luxembourg. En un demi-siècle d’activité, la section est passée d’une douzaine à près de 6 000 sympathisant·e·s et compte aujourd’hui huit employées. Grâce aux nombreuses personnes qui offrent leur temps, leurs talents et leur générosité, nous avons remporté pendant ces cinquante années d’importantes victoires pour les droits humains. Merci beaucoup pour votre soutien !

Notre 50ième anniversaire est aussi l’occasion pour nous de rajeunir notre communication en privilégiant les canaux numériques et en réduisant l’utilisation du papier dans une démarche éco-responsable. C’est pourquoi cette nouvelle AI-Luxembourg News présente moins de pages. Nous vous informerons désormais plus régulièrement avec notre nouvelle newsletter ! Ce n’est que le début du renouvellement : vous en apprendrez davantage au cours de cette année anniversaire.

Le sort des Ouïghours en chine mis en lumière

Amnesty International Luxembourg a organisé une action de solidarité et une remise de pétitions devant l’ambassade de Chine le 3 février pour attirer l’attention sur le sort de Yiliyasijiang Reheman. Ce jeune ouïghour a disparu en juillet 2017 en Égypte, sur ordre des autorités chinoises. Près de 900 personnes au Luxembourg se sont mobilisées pour lui dans le cadre du marathon des lettres d’Amnesty International qui a eu lieu durant les dernières semaines de 2019.

Comme Yiliyasijiang Reheman, plus d’un million de personnes appartenant aux minorités musulmanes de la région autonome ouïghoure du Xinjiang, à l’extrême nord-ouest de la Chine, sont enfermées dans des « camps de rééducation politique ». Les autorités chinoises mènent une campagne de plus en plus intense d’internements en masse, d’endoctrinement politique et d’assimilation culturelle forcée à l’encontre de ces minorités.

Record à la fin de l’année

Notre quatrième Festival des droits humains et le Marathon des lettres ont été dédiés lors de cette édition 2019 à dix jeunes et groupes de jeunes qui luttent pour les droits humains autour du monde. Un grand merci à tou·te·s les participant·e·s qui ont contribué à un résultat record : rien qu’au Luxembourg, plus de 10 300 signatures, lettres et cartes de solidarité ont été récoltées !

Nous tenons aussi à remercier les deux partenaires du festival, la Ville de Luxembourg et les Rotondes, ainsi que l’artiste Raphael Gindt qui a réalisé deux magnifiques peintures murales sur la façade de l’École Privée Fieldgen. Ces portraits mettent en lumière deux jeunes activistes pour lesquels·elles nous nous sommes mobilisé·e·s en cette fin d’année (c.f. photo de couverture).

Un grand merci également aux nombreuses personnes qui ont participé à la campagne bougies 2019 : les bénévoles sur les stands, celles et ceux qui ont vendu les bougies Amnesty dans leur entourage et, enfin, le Comptoir Pharmaceutique Luxembourgeois qui a assuré les livraisons. Grâce à l’engagement de tous, nous avons pu vendre un total de 6 513 bougies !

Coupables… d’avoir sauvé des vies

Ces dernières années, dans plusieurs pays européens, les défenseur·e·s des droits humains (DDH) et les organisations de la société civile qui apportent une aide aux réfugié·e·s et migrant·e·s doivent faire face à des poursuites judiciaires infondées, à des restrictions abusives de leurs activités, à des manœuvres d’intimidation et de harcèlement et à des campagnes de dénigrement. En portant secours aux personnes en situation de danger en mer ou dans des régions montagneuses, en leur offrant de la nourriture et un abri, en rassemblant des informations sur les violences commises par la police et les gardes-frontières, et en s’opposant à des expulsions illégales, les DDH rendent visibles les conséquences cruelles des politiques migratoires, mais en représailles, ils·elles sont eux-mêmes pris pour cibles par les pouvoirs publics.

« Face à l’incapacité des États européens à répondre aux besoins fondamentaux des personnes réfugiées et migrantes, ce sont souvent des citoyens et citoyennes ordinaires qui se chargent de leur apporter l’aide et les services nécessaires », a déclaré Elisa De Pieri, chercheuse sur l’Europe à Amnesty International. « En sanctionnant les gens qui redoublent d’efforts pour combler les lacunes des pouvoirs publics, les gouvernements européens exposent les personnes en mouvement à un danger encore plus grand. »

Un nouveau rapport d’Amnesty montre que dans le cadre des politiques adoptées par l’UE en matière d’asile et d’immigration, les autorités nationales ont, à de multiples reprises, utilisé de façon abusive des lois et des politiques relatives aux personnes migrantes ainsi que d’autres mesures pour réprimer les activités de celles et ceux qui défendent les droits fondamentaux des personnes en mouvement. Par conséquent, le travail des défenseur·e·s est entravé davantage et ils·elles sont obligé·e·s d’utiliser une partie de leurs maigres ressources et de leur énergie pour se défendre devant les tribunaux.

Amnesty International a étudié des cas de défenseur·e·s des droits humains poursuivis pour des motifs fallacieux dans huit pays entre 2017 et 2019. Par exemple, des ONG en Croatie telles que Are You Syrious et Centre for Peace Studies ont fait l’objet de manœuvres d’intimidation et de harcèlement et ont été déférées devant la justice pour « aide à l’immigration irrégulière », après avoir été les témoins gênants de renvois forcés illégaux et d’expulsions collectives pratiqués par les pouvoirs publics à la frontière avec la Bosnie-Herzégovine et la Serbie.

En France, des DDH ayant apporté leur aide aux personnes qui empruntent, à pied, la dangereuse route des Alpes pour atteindre la frontière française via l’Italie, ont été poursuivis et condamnés pour « aide à l’entrée irrégulière » de personnes étrangères en France. D’autres défenseur·e·s qui avaient distribué de la nourriture et des produits de première nécessité à des personnes réfugiées et migrantes près de Calais ont fait l’objet d’actes de harcèlement et d’intimidation de la part de la police, et ont été poursuivi·e·s en justice après avoir contesté le comportement abusif des policiers.

Sarah Mardini et Séan Binder (sur la photo), deux secouristes bénévoles d’une ONG basée sur l’île grecque de Lesbos, ont passé plus de 100 jours en détention provisoire. Tous deux sont accusé·e·s d’aide à l’entrée irrégulière d’étrangers dans le pays, d’espionnage, de blanchiment d’argent, et de faux et usage de faux.

Pétition pour les militant·e·s réduit·e·s au silence en Arabie saoudite

Depuis 2011, le Tribunal pénal spécial est utilisé comme instrument de répression pour réduire l’opposition au silence, et cela avec de terribles conséquences. Parmi les personnes lourdement condamnées se trouvent des journalistes, des militant·e·s politiques, des écrivains, des religieux et des défenseures des droits des femmes. N’hésitant pas à recourir à la Loi de lutte contre le terrorisme et la Loi relative à la lutte contre la cybercriminalité, deux textes draconiens, les juges du Tribunal pénal spécial ont présidé des procès d’une iniquité flagrante et prononcé des peines allant jusqu’à 30 ans de prison et de nombreuses condamnations à mort.

Depuis deux ans, les autorités saoudiennes tentent de redorer l’image du royaume en adoptant quelques réformes positives, notamment concernant les droits des femmes, mais ces réformes tiennent plus de l’opération marketing que d’un véritable changement. En effet, le gouvernement mène une politique intense de répression contre les citoyen·ne·s qui réclament pacifiquement des réformes, parfois les mêmes que celles adoptées par le prince héritier.

Il est frappant de constater que, depuis 2017, les autorités ont ciblé presque toutes les personnes défendant les droits humains et critiquant le gouvernement, au moyen d’arrestations arbitraires, de tortures et de poursuites devant le Tribunal pénal spécial et d’autres juridictions. Aujourd’hui, presque toutes celles et ceux qui font entendre une voix indépendante en Arabie saoudite sont derrière les barreaux, où ils·elles purgent de longues peines de prison. C’est le cas de Raïf Badawi, Loujain al-Hathloul, Nassima al-Sada, Aziza al-Yousef, Mohammad al-Otaibi et bien d’autres.

Il est plus que temps que l’Arabie saoudite applique les réformes dont elle se vante ; et en tant qu’hôte du G20 en novembre prochain, elle doit respecter les droits fondamentaux !

La répression des personnes pacifiques faisant usage de leur liberté d’expression doit cesser. Les défenseur·e·s des droits humains doivent être libéré·e·s immédiatement et sans condition. Signez la pétition !