Réagissant à la flagellation infligée à deux étudiants dans la province indonésienne de l’Aceh parce qu’ils ont eu des relations sexuelles consenties avec une personne du même sexe, Montse Ferrer, directrice régionale adjointe d’Amnesty International, a déclaré :
« La flagellation de deux hommes gays en Indonésie est un horrible acte de discrimination. Les relations sexuelles intimes entre adultes consentants ne devraient jamais être érigées en infraction pénale, et personne ne devrait être puni en raison de son orientation sexuelle réelle ou supposée.
« Après la brutale atteinte à leur vie privée qu’ils ont subie lorsqu’ils ont été surpris par des membres du public tandis qu’ils étaient en train d’avoir des relations sexuelles, ces hommes ont été humiliés en public et ont subi des blessures physiques.
« Ces peines de flagellation sont cruelles, inhumaines et dégradantes, et peuvent constituer un acte de torture. Les autorités de l’Aceh et du gouvernement central indonésien doivent prendre des mesures immédiates pour mettre fin à ces pratiques et abroger les lois qui les autorisent.
« Ces lois doivent être mises en conformité avec le droit et les normes internationales en matière de droits humains, ainsi qu’avec les obligations qui incombent à l’Indonésie en vertu de sa propre Constitution. L’autonomie régionale de l’Aceh, qui lui permet d’appliquer la charia (droit musulman), ne doit pas se faire au détriment des droits humains. »
Complément d’information
Deux étudiants d’université ont été flagellés en public dans la ville de Banda Aceh parce qu’ils avaient eu des relations homosexuelles consenties. L’un des deux hommes a reçu 77 coups de canne, tandis que son partenaire a reçu une peine légèrement plus lourde de 82 coups pour avoir fourni un lieu pour leurs activités sexuelles consenties.
Selon les médias, les deux hommes ont été arrêtés le 7 novembre 2024 par des habitants qui sont entrés de force dans la chambre qu’ils louaient à Banda Aceh et qui les ont ensuite livrés à la police de la charia pour qu’ils fassent l’objet d’une enquête.
Les arrestations de citoyen·ne·s sont courantes en Aceh en raison de l’application de la charia, qui permet aux habitant·e·s de remettre des personnes à la police de la charia pour qu’une enquête soit ouverte. L’Aceh est la seule province d’Indonésie qui criminalise les actes sexuels consentis entre personnes de même sexe, en raison de son statut autonome spécifique qui lui permet d’appliquer le Code pénal islamique depuis 2015.
Des règlements régissant l’application de la charia sont en vigueur en Aceh depuis l’adoption de la Loi spéciale relative à l’autonomie, en 2001, et sont appliqués par des tribunaux islamiques.
Ces lois prévoient dans certains cas jusqu’à 200 coups de canne pour punir des infractions telles que l’intimité ou les activités sexuelles librement consenties entre personnes non mariées, les relations sexuelles en dehors du mariage, les relations sexuelles entre personnes du même sexe, la consommation et la vente d’alcool et les jeux d’argent.
Au titre du droit international relatif aux droits humains, toutes les formes de châtiments corporels sont interdites, car elles constituent une peine cruelle, inhumaine ou dégradante, voire bien souvent de la torture.
Depuis le début de l’année, 15 personnes ont été condamnées à la flagellation en Aceh pour diverses violations de la charia, et des peines similaires ont été prononcées contre 135 personnes au total en 2024.
Dans une autre affaire, le 4 février 2025, la police de la charia de la ville de Lhokseumawe, en Aceh, a fait une descente dans une maison et a arrêté quatre hommes qui, selon elle, avaient des relations homosexuelles, après avoir reçu des informations de la part de résident·e·s locaux. Après cette arrestation, des responsables locaux ont déclaré qu’ils allaient patrouiller dans la province, afin de surveiller les « activités LGBTI », notamment dans les salons de beauté où de nombreuses femmes trans gagnent leur vie en Aceh. À la suite de cela, le 15 février, des habitants ont fait une descente dans une chambre louée à Banda Aceh et ont remis une femme trans et un homme à la police de la charia pour qu’elle ouvre une enquête.