En réaction à l’arrestation de cinq dirigeants du journal Apple Daily et de la saisie de matériel journalistique lors d’une descente de police effectuée dans les locaux de cet organe de presse à Hong Kong dans la matinée du 17 juin, Yamini Mishra, directrice régionale pour l’Asie et le Pacifique à Amnesty International, a déclaré :
« Avec cette attaque éhontée contre l’un de leurs plus virulents détracteurs dans la sphère médiatique, les autorités de Hong Kong intensifient la répression contre la liberté de la presse et se servent du prétexte de la » sécurité nationale » comme justificatif.
« Le fait qu’elles invoquent le contenu d’articles de l’Apple Daily comme motifs d’arrestation au titre de la loi sur la sécurité nationale est très inquiétant et pourrait avoir de lourdes conséquences pour tous les médias présents à Hong Kong.
« Les normes internationales relatives aux droits humains indiquent clairement que la » sécurité nationale » peut être invoquée uniquement pour justifier la restriction des droits et des libertés face à des menaces de violence spécifiques, véritables, avérées, imminentes et sans ambigüité, ou à l’usage de la force.
« Il est grotesque de faire valoir que les articles de presse critiques qui sont semble-t-il à l’origine de la descente effectuée ce matin remplissent ces critères, tout en prétendant s’appuyer sur le droit international pour se justifier. Une nouvelle fois, la » sécurité nationale » sert de fourre-tout pour réduire au silence les détracteurs à Hong Kong.
« La protection des documents journalistiques est cruciale pour permettre aux médias de dénoncer des méfaits sans crainte de représailles. Or, les autorités retirent globalement ces protections, mettant en péril imminent les sources confidentielles et les informateurs. Il s’agit d’une attaque contre la liberté d’expression de la presse, mais aussi contre la liberté des lecteurs de recevoir librement l’information.
« Tous les professionnels des médias arrêtés aujourd’hui uniquement pour avoir fait leur travail légitime de journalistes doivent être libérés sur-le-champ. Le journalisme n’est pas un crime. »
Complément d’information
Tôt dans la matinée du 17 juin, les autorités de Hong Kong ont arrêté cinq dirigeants de l’organe de presse Apple Daily, un quotidien très critique diffusé à Hong Kong.
Selon le porte-parole de la police de Hong Kong, ils ont été arrêtés en raison de leur rôle dans la publication de plus de 30 articles qui appelaient des pays étrangers à imposer des sanctions.
Tous ont été inculpés de « collusion avec un pays étranger ou avec des éléments extérieurs en vue de mettre en péril la sécurité nationale » au titre de la loi sur la sécurité nationale en vigueur à Hong Kong.
Les locaux de cet organe de presse ont fait l’objet d’une descente effectuée par 500 policiers, qui ont emporté avec eux ordinateurs et documents, dont certains contenant du matériel journalistique. Les autorités se sont appuyées sur l’article 43 de la Loi sur la sécurité nationale, qui confère à la police des pouvoirs étendus s’agissant de procéder à des perquisitions, de saisir des biens et d’obtenir des informations.
Steve Li Kwai-wah, commissaire divisionnaire des services de police affectés à la sécurité nationale, a invoqué le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), traité fondamental relatif aux droits humains de l’ONU que Hong Kong est tenu de respecter. Il a affirmé que ce traité permet de restreindre « la liberté de la presse et de publication » pour des motifs de sécurité nationale.
Les personnes interpellées aujourd’hui sont le directeur général d’Apple Daily Cheung Kim-hung, le directeur des opérations Chow Tat-kuen Royston, le rédacteur en chef du journal Ryan Law, le rédacteur en chef adjoint Chan Pui-man et le directeur de la plateforme numérique Apple Daily Digital Cheung Chi-wai.
Le fondateur du journal, Jimmy Lai, a été interpellé et inculpé au titre de la loi sur la sécurité nationale en août 2020, le même jour qu’une précédente descente de police effectuée dans les locaux d’Apple Daily.
En outre, les autorités ont gelé 18 millions de dollars hongkongais (près de 1 950 000 euros) d’avoirs appartenant à des entreprises liées à Apple Daily.
Depuis sa promulgation en juin 2020, au moins 113 personnes ont été interpellées au titre de la loi sur la sécurité nationale.