Climat, biodiversité, justice : ce que Votum Klima attend du Luxembourg à la COP30

La COP30 s’inscrit dans un contexte international prĂ©occupant : montĂ©e du climatoscepticisme, violations du droit international, violentes attaques contre les droits humains et fragilisation de la solidaritĂ© internationale. Pourtant, 2025 est aussi une annĂ©e charniĂšre, marquĂ©e par des avancĂ©es historiques : l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice qui consacre les obligations des États face au changement climatique, ou encore l’adoption du traitĂ© sur la haute mer. Ces signaux rappellent que le droit international et le multilatĂ©ralisme peuvent ĂȘtre des leviers puissants. À BelĂ©m, la COP30 devra renouer avec l’esprit de la COP21 et porter une ambition Ă  la hauteur des crises comme des espoirs.

L’objectif des 1.5 C° et la sortie complĂšte et rapide des Ă©nergies fossiles

Il a Ă©tĂ© clarifiĂ© par les juges internationaux que respecter l’Accord de Paris et l’objectif des 1.5C° n’est pas une option, mais une obligation juridique et une responsabilitĂ© historique pour le Luxembourg. Cela doit dorĂ©navant tracer la voie d’une transition plus juste, au Luxembourg comme dans le reste du monde, qui ne laisse personne de cĂŽtĂ©, en accompagnant les travailleurs et travailleuses, ainsi que les populations les plus vulnĂ©rables, vers des sociĂ©tĂ©s rĂ©silientes, inclusives et dĂ©carbonĂ©es.

Pour ce faire il est indispensable que le Luxembourg et l’Union EuropĂ©enne concrĂ©tisent la transition vers la sortie juste, Ă©quitable et rapide des Ă©nergies fossiles conformĂ©ment au paragraphe 28 du Bilan mondial, car dĂ©sormais “le fait pour un État de ne pas prendre les mesures appropriĂ©es pour protĂ©ger le systĂšme climatique contre les Ă©missions de GES ⎯ notamment en produisant ou en utilisant des combustibles fossiles, ou en octroyant des permis d’exploration ou des subventions pour les combustibles fossiles ⎯ peut constituer un fait internationalement illicite attribuable Ă  cet État.”

Dans le mĂȘme temps, le retrait de plusieurs grandes institutions financiĂšres de la Net Zero Banking Alliance envoie un signal d’alarme inquiĂ©tant quant Ă  la crĂ©dibilitĂ© des engagements volontaires du secteur financier. Cette Ă©volution met en lumiĂšre la fragilitĂ© d’une approche fondĂ©e sur l’autorĂ©gulation et souligne l’urgence d’un cadre international contraignant pour garantir la transparence, la redevabilitĂ© et le dĂ©sengagement effectif des Ă©nergies fossiles. Sans de telles rĂšgles, la finance climatique risque de s’essouffler, compromettant Ă  la fois l’atteinte de l’objectif de 1.5°C et la justice climatique, en rĂ©duisant notamment les flux de capitaux vers l’adaptation et la transition juste dans les pays les plus vulnĂ©rables.

Un financement climatique juste

Un financement climatique juste signifie que le Luxembourg doit aussi payer sa juste part. A la COP30, les pays du Nord global doivent prĂ©senter un plan clair pour atteindre les 300 milliards de dollars par an, et identifier les acteurs et les actions nĂ©cessaires pour concrĂ©tiser l’objectif plus large de 1 300 milliards de dollars dĂ©diĂ©s au financement climatique. Ce plan doit inclure des Ă©tapes prĂ©cises et des objectifs intermĂ©diaires pour rĂ©pondre aux besoins des pays les plus vulnĂ©rables en s’appuyant sur l’équitĂ©, la solidaritĂ© et la responsabilitĂ© historique des pays pollueurs. Les financements doivent couvrir l’attĂ©nuation, l’adaptation, mais aussi le fonds pertes et dommages. Les fonds doivent ĂȘtre prĂ©visibles et composĂ©s principalement de subventions publiques, nouvelles et additionnelles Ă  l’aide au dĂ©veloppement. Il est indispensable que ces fonds soient octroyĂ©s directement aux acteur·rices de terrain, et notamment aux peuples autochtones. Les compagnies fossiles, grandes responsables du dĂ©rĂšglement climatique, doivent aussi payer pour les dommages qu’elles ont causĂ©s.

Nous appelons le gouvernement luxembourgeois Ă  soutenir activement les initiatives de rĂ©forme du systĂšme financier international visant Ă  corriger les injustices structurelles, telles que la dette illĂ©gitime des pays du Sud, l’iniquitĂ© du systĂšme fiscal mondial et l’influence disproportionnĂ©e des agences de notation. Le Luxembourg, aux cĂŽtĂ©s de l’Union europĂ©enne, doit contribuer de maniĂšre constructive au processus de nĂ©gociation de la Convention-cadre des Nations Unies sur la coopĂ©ration fiscale internationale, qui se tiendra Ă  Nairobi en parallĂšle de la COP30, et rejoindre les pays du Sud global dans leur appel Ă  l’élaboration d’une convention Ă©quivalente sur la dette souveraine, afin de bĂątir un systĂšme Ă©conomique vĂ©ritablement juste.

Le lien étroit entre climat et biodiversité

La COP30 Ă  BelĂ©m doit sonner l’alerte : l’Amazonie, pilier du climat mondial, est en danger. Chaque annĂ©e, cette forĂȘt absorbe des milliards de tonnes de CO₂, mais sa dĂ©forestation pourrait bientĂŽt provoquer un basculement irrĂ©versible. ProtĂ©ger l’Amazonie n’est pas une option, c’est une urgence climatique qui souligne le lien Ă©troit entre biodiversitĂ© et climat.

Le Luxembourg doit permettre de renforcer la cohĂ©rence des mĂ©canismes de lutte contre la dĂ©forestation et soutenir des initiatives comme le Tropical Forest Forever Facility (TFFF), en reconnaissant le rĂŽle essentiel des peuples autochtones et des communautĂ©s locales dans la conservation de ces Ă©cosystĂšmes, et garantissant leur participation aux dĂ©cisions. Ceci implique de mettre en place des garde-fous pour Ă©viter les mesures d’attĂ©nuation ou de compensation sur des territoires autochtones sans leur consentement prĂ©alable libre et Ă©clairĂ© (FPIC).

Pour rĂ©pondre ensemble Ă  la crise climatique et Ă  l’érosion de la biodiversitĂ©, il faut intĂ©grer pleinement la nature dans les contributions dĂ©terminĂ©es au niveau national et les Plans nationaux d’adaptation, en cohĂ©rence avec les stratĂ©gies nationales pour la biodiversitĂ©. La COP30 doit renforcer la coopĂ©ration entre les Conventions de Rio, afin d’assurer une mise en Ɠuvre conjointe de l’Accord de Paris et du cadre mondial pour la biodiversitĂ©. Le suivi de l’objectif mondial d’adaptation doit inclure des indicateurs solides, comme la liste rouge des espĂšces et des Ă©cosystĂšmes, pour Ă©valuer les impacts et l’efficacitĂ© des politiques. Enfin, la transition vers les Ă©nergies renouvelables doit ĂȘtre menĂ©e dans le respect de la nature, en protĂ©geant et restaurant les Ă©cosystĂšmes.

Respecter les droits des peuples autochtones et de la société civile

Alors que les peuples autochtones du BrĂ©sil voient leurs droits et leurs territoires menacĂ©s par l’agro-business et les industries fossiles, les droits humains doivent ĂȘtre placĂ©s au cƓur de l’action climatique et de toutes les nĂ©gociations de la CCNUCC, afin d’atteindre la justice climatique. Cela implique de garantir la participation pleine et entiĂšre de la sociĂ©tĂ© civile, des jeunes, des femmes et minoritĂ©s de genre, des personnes en situation de handicap et des peuples autochtones. Ce sont bien ces populations “marginalisĂ©es” qui sont les premiĂšres affectĂ©es par les catastrophes climatiques et auxquelles il faudra assurer une voix et une place prĂ©pondĂ©rante. ProtĂ©ger l’espace civique est essentiel : la libertĂ© d’expression, d’association et de rĂ©union pacifique doit ĂȘtre respectĂ©e Ă  BelĂ©m lors de la COP30, ainsi qu’au Luxembourg.

L’organisation du Sommet des peuples en marge de la COP30, ainsi que la participation historique des peuples autochtones dans les nĂ©gociations, sont Ă  cet Ă©gard essentielles : elles reprĂ©sentent l’expression directe de la sociĂ©tĂ© civile et doivent ĂȘtre pleinement entendues afin que leurs recommandations soient prises en compte dans les dĂ©cisions finales prises Ă  BelĂ©m.

Il est Ă©galement indispensable de renforcer la protection des dĂ©fenseurs et dĂ©fenseuses des droits humains et de l’environnement, afin que personne ne soit rĂ©duit au silence dans la lutte contre la crise climatique. Votum Klima appelle le Luxembourg et l’ensemble de la communautĂ© internationale Ă  placer les droits humains, les droits de la nature et ceux des gĂ©nĂ©rations futures au centre de l’action climatique, afin de promouvoir l’équitĂ© et l’inclusion et de garantir la justice climatique, raciale et de genre.

Note: Membres de Votum Klima : Amnesty, ASTM, CELL, Cercle de Coopération, Etika, Eurosolar Lëtzebuerg, Fairtrade Lëtzebuerg, FrÚres des Hommes, Greenpeace, natur&ëmwelt, Partage, ProVelo, SOS Faim, Vereenegung fir Biolandwirtschaft Lëtzebuerg a.s.b.l.

Contacts :

AltynaĂŻ Bidaubayle (she/her), Greenpeace | altynai.bidaubayle@greenpeace.org | +352 621 652 667

David Hoffmann (he/him), ASTM | david.hoffmann@astm.lu  | +352 621313366 (présent à Belem)

Esmeralda Wirtz (they/them), Amnesty International Luxembourg | e.wirtz@amnesty.lu | +352 661 333 288